La sclérose en plaques,
c'est vous qui en parlez le mieux.
Le 30 mars 2019

Sclérose en plaques, témoignage de Pascal.

« Je suis seul au monde, étourdi. »

« Le sable encore chaud en ce début de soirée recouvre une partie de mes jambes. Mon regard est fixé sur l’horizon qui, bleuté d’une teinte pâle, tranche singulièrement avec le soleil qui décroît et va bientôt se noyer dans l’océan. Je suis bien là, seul face aux éléments. J’ai toujours aimé une certaine solitude, je suis assez secret comme garçon…

Depuis un mois maintenant, je vis ici dans le Médoc. Une page blanche s’offre à moi, je veux y conter une nouvelle histoire, la plus belle possible malgré ces mots barbares que, contraint, je dois y apposer.
Une des raisons qui m’a poussée à mon exil aquitain est, depuis de nombreuses années, le rêve de refaire du surf. Mes années guyanaises, où je m’étais adonné, adolescent, aux joies de la glisse, m’ont profondément marqué et ce fort désir de vivre à fond devant l’urgence, avant que mon corps ne s’abandonne un jour à cette maladie, a fait le reste...

La fraîcheur de l’océan n’a pas altéré mon enthousiasme, assis sur ma planche je fais face à l’infini. Les vagues sont quasi inexistantes, mais à cet instant je m’en fous royalement. Je suis bien, là, dans l’eau, si léger. Un sentiment de toute puissance m’envahit peu à peu, je me sens fort, plus fort qu’elle surtout qui, un jour, a sournoisement décidé de se mesurer à moi. Je veux la défier, l’humilier cette chose qui s’empare, pour le moment, plus de ma tête que du reste. Alors, doucement les mots sortent :

- Tu crois que tu vas me niquer, hein ? 
- Mais tu es qui toi, pour vouloir me pourrir la vie ? 
- Tu peux aller te faire foutre !

Le ton se veut maintenant plus fort, je suis submergé par un mélange difficilement identifiable. Debout dans l’eau, j’hurle littéralement comme un fou des « caaasse toi putain ! casse toi ».
Je suis seul au monde, étourdi. Je donne des grands coups de poings dans l’eau. J’éructe ma rage encore et encore. La notion de temps s’est envolée, tout comme les dernières lueurs de ce beau soleil rose vif. Les bras levés au ciel comme un vainqueur, je me soûle de cette victoire. Je suis totalement silencieux et calme à présent. Vidé d’un trop plein de stress et d’angoisse, je suis apaisé. Je vagabonde, mentalement. Ma femme et mon fils d’un an accaparent toutes mes pensées, je les couvre de baisers, ils sont là avec moi, je les serre, nous ne sommes qu’un.

À cet instant, ma sclérose en plaques n’existe plus, je suis tellement heureux ».

Par Pascal.

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Rediffusion du 14/12/2009.

16 commentaires
31/03/2019 à 16:24 par maillet
Dix ans ... texte republié au bout de dix ans. Pourquoi ? Dans les commentaires , d'il y a dix ans , les compliments vont à Duke : pour la qualité de son témoignage , de son texte , la beauté de son écriture ... Duke et Pascal sont-ils la même personne ? Moi, je le lis aujourd'hui fin mars 2019 : je ne peux dire qu'une chose . Oui , ce texte est vraiment touchant et d'une très belle écriture .

06/02/2017 à 12:26 par Martine
Super cette façon de dissocier cette maladie entre le corps et la tête. Cette saloperie me bouffe la vie depuis 25 ans. J'ai essayé de l'oublier mais...
Ton idée me plaît, je vais tenter de me l'appliquer !!!
Merci !!
Bizzz

06/02/2017 à 11:46 par fred
Bonjour
tellement différent de tous les témoignages ! tellement beau !
moi aussi au début je parlais à cette maladie, tu ne me pourrira pas la vie ! .....
Il y a mon corps d'un côté (malade) et ma tête de l'autre, qui elle ne veut pas se laisser submerger par Elle (la sep)
ça a toujours surpris les kinés et autres. "C'est bizarre comment vous parlez de votre maladie, vous dissociez votre corps en 2". Et oui la maladie, ce n'est pas moi !!!
Bonne continuation , il y a tout de même de bons moments
Biz

23/01/2012 à 15:50 par Dany de Fanal Safran
Tu as un don pour l'écriture Duke. On a tous parlé de cette "s.. perie", compagne de chaque jour ... et toi tu nous fais rêver avec tes mots, ta prose. Si tu pouvais nous écrire un livre et peut-être es-tu aussi doué pour l'aquarelle. Tu me fais penser à la chanson "Il est libre Max" Y'en a qui l'ont vu voler.

03/05/2010 à 09:50 par karine
ha ...l'océan d'amour, il panse les plaies, et rend léger... superbe témoignage... de plus je suis une inconditionnelle pas de la planche nan lol, (j'aime pas être sur l'eau j'aime être dedans) il est vrai que face à cet élément on se sent renforcé. super témoignage... que tout aille pour le mieux pour vous trois et pour tout ceux qui se battent contre un mal sepiens ou pas...

01/05/2010 à 11:58 par Sep à moi
Je pleure tellement c'est beau...............

15/12/2009 à 20:48 par moody
j'ai beaucoup aimé, beau témoignage, belle plume aussi

15/12/2009 à 08:48 par martine
très belle plume. Tu écris Duke ?
sinon tu devrais le faire, quel talent !
Martine

15/12/2009 à 00:20 par guimauve
salut duke !
contente de te lire ici, ton témoignage est vraiment chouette...et tellement vrai, on se reconnait forcement !
gros bizzzz l'ami

14/12/2009 à 19:56 par Clalis
Bonsoir Duke,

Alors là, je dis bravo. Tu te bas contre cette saloperie qui ne nous fait pas de cadeaux. Soyons plus fort qu'elle. Bonne philosophie c top. Femme et enfant sont là, c trés bien.
Courage. Bisous

14/12/2009 à 19:48 par Florence
Bonsoir Duke,

La "SEPosphère" est immense, et pourtant on y croise au hasard des articles des amis virtuels...
J'ai beaucoup aimé ton témoignage, sa poésie, sa rage de vivre. Les sentiments ambivalents, désespoir, rage, courage et hargne, et puis le parfum en filigrane d'une si belle région!!
Je te souhaite bon vent, au plaisir de te retrouver sur un blog, ou l'autre :-)
Flo

14/12/2009 à 18:48 par anza
Whouaw Excellent Duke, j'ai trouvé ça génial, super bien écrit quoi.
Moi aussi un enfant et une femme qui m'aime, ma motivation.

La bise
anza

14/12/2009 à 18:28 par duke
Merci pour ces retours positifs, c'est très gentils.
Bien à vous tous

14/12/2009 à 12:19 par Martine
Quel fantastique témoignage ! avec une telle volonté tu parviendras, c'est sûr, à repousser cette saloperie de maladie, il faut y croire et résister à fond ! c'est ce qui me fait vivre moi aussi !

bizzzzzzz

14/12/2009 à 11:36 par Adrienne/handiady
Tu devrais écrire, Duke, ton style est magnifique!!!
Oui, crier, se battre comme contre desmoilins à vents, brasser l'eau... La SEP nous tient hélas, et certains plus rudement que d'autres! Un seum mot d'ordre: résister. S'entourer, se faire plaisir, carpe diem! Eloigner ce qui nuit, dérange, ce qui est toxique pourle moral. Crier s'il le faut pour se libérer, je l'ai fait sur mon blog sous forme de montages photos humour "casse-toi ma SEP!"
Bon vent à toi Duke! Hisse ta grand voile et résiste! BIZ!

14/12/2009 à 10:04 par spirckel
Bonjour,

Votre témoignage est touchant, plein de vie, de souffrance et d'espoir . Bravo
Karine

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