La sclérose en plaques,
c'est vous qui en parlez le mieux.
Le 23 oct. 2016

Ludovic nous parle de la sclérose en plaques et le sport.

« Ne lâchez rien !
La sclérose en plaques
m’a donné des ailes ! »

- Marathon de Berlin -

« Bonjour à tous,

Courir un marathon… courir un marathon… courir un marathon… Depuis le jour où j’ai franchi la ligne d’arrivée du Zenitram Day (un trail en Eure-et-Loir), le 19 octobre 2014, l’idée me trotte dans la tête et j’ai donc décidé de me lancer ce défi : courir les 42,195 km mythiques d’un marathon.
Bernard Gentric était sur un projet avec Laurent Tricot pour courir le marathon de Berlin avec des personnes atteintes de sclérose en plaques. Ils m’ont proposé d’être de la partie ! J’ai tout de suite accepté, sans hésiter !
Ce doux rêve du courir un marathon, il est sur ma liste des défis à réaliser depuis le début. J’avais un an pour m’entraîner encore plus et éviter les blessures pour être sûr d’atteindre mon objectif. La tâche n’allait pas être facile. Mais je me sentais largement capable de le faire et je savais que j’allais trouver les ressources nécessaires pour y arriver.
Le maître mot était : préparation. Hors de question de se lancer dans une telle épreuve sans avoir une condition physique adaptée. Je m’étais fixé, au minimum, une heure de sport par jour et aller courir 3 ou 4 fois par semaine en augmentant progressivement la durée des courses. Je n’ai pas d’objectif de temps, simplement celui d’arriver au bout !
Je me souviens, lors du Zenitram Day, d’en avoir bavé… vraiment bavé.
Je n’étais pas du tout préparé et les 5 derniers kilomètres avaient été un vrai calvaire. J’ai eu les larmes aux yeux en franchissant la ligne d’arrivée. À ce moment-là, je me demandais comment font les gens pour faire 4 fois la distance que je venais de parcourir… Réponse : ils s’entraînent !

Départ pour le marathon :
Départ jeudi de la maison. Je décide de faire une petite escale dans la famille à Paris, cela m’évitera de trop faire de route le matin et me permettra de me reposer au maximum pour Berlin.
Le vendredi matin. Arrivé à l’aéroport à 8h00. Décollage pour 10h40. Je me dis que je suis dans les temps pour prendre un café et là, je reçois une notification sur mon téléphone qui me dit que mon vol est annulé. Je me lève pour regarder la pancarte qui affiche les vols et je vois que le mien est bien annulé… Je sens que si ça commence comme ça, le week-end va être chaud ! Mes pas de stress, il y a un correspondant pour gérer tous ces petits problèmes. Je vais le voir et je lui demande comment cela va se passer. Il revient et me dit que c’est bon, je vais pouvoir prendre l’avion de 9h30. Ça c’est du rapide (action-réaction) ! Me voilà dans le sas de départ et je vois des visages que je connais : Benoît, Nadia, etc… C’est maintenant que tout va commencer ! Décollage pour Francfort où nous avons 1h30 d’attente… Je ne pense à rien d’autre que de retrouver ma chambre d’hôtel pour dormir. Mais non, le dodo ce n’était pas pour tout de suite car arrivé à Berlin, un bus nous dépose d’abord au hall expo du marathon pour retirer nos dossards. Après, nous visitons Berlin en bus, je suis HS et la guide nous raconte l’histoire de Berlin mais je ne calculais rien, mon cerveau était en mode « off ». Heureusement qu’il n’y avait pas une interrogation écrite sur cette visite :-).
La visite terminée, on va à l’hôtel et je me dis que je vais enfin pouvoir me poser un peu !

Nous voilà le jour du marathon.
Je me lève à 5h30. Comme la salle du petit déjeuner n’ouvre qu’à 6h00, j’ai le temps de prendre une douche. Puis, je descends tranquillement prendre mon petit-déjeuner en « jean, claquette, tee-shirt », en mode touriste :-) 
Dans la salle, je vois des coureurs qui sont déjà prêts, équipés pour aller en découdre avec les 42,195 km ! À ce moment, je me dis que je ne dois pas stresser car j’ai le temps donc je déjeune tranquillement… Puis je remonte dans la chambre pour me préparer. Voilà, je suis enfin prêt pour aller au marathon.
8h30, départ de l’hôtel.

Me voilà sur la ligne de départ. Pas de stress car la règle numéro 1 est de prendre du plaisir et de finir ce marathon. C’est hallucinant le monde qu’il y a. Plus de 50 000 personnes ! Une ambiance de dingue ! Ça change de mes petites courses de campagne :-)
Heureusement, je ne suis pas seul car quelques coureurs de la team sont avec moi comme Oliv’, Myriam, Bruno sans oublier Olivier Chaigne qui m’accompagnera pendant la course. Son soutien va être d’une importance considérable pour finir ce marathon ! Vous aller bientôt comprendre pourquoi, quelques kilomètres plus loin !
Je suis bien mentalement, en pleine concentration. Juste un mot résonne dans ma tête : « ligne d’arrivée ». Là, je me dis que mon mental va en prendre un coup. Déjà que je suis parti sans ma petite famille… Mais je reste fort !

Voilà le départ !
Je ne dois pas partir comme une balle si je veux tenir les 42,195 km !
Pendant les premiers kilomètres, je me sens bien, même très bien, les jambes sont là. Olivier Chaigne me suit depuis le début. Il m’a dit : « je reste avec toi et si tu as besoin de quoi que ce soit, tu me demandes ». Et dans ma tête, je me dis : « t’inquiète pas, ça va aller ». Mais plus tard, j’allais m’apercevoir que son soutien sera la clef pour franchir la ligne d’arrivée.
Au kilomètre 5 se trouve le ravitaillement. Je me sens très bien, je dépasse même les « «meneurs d’allure des 4h30 ». Je me dis : « Ludo tu es bien, continue ! ». Je passe les 10 km, je suis encore au top donc je fais des relances de 400/500 mètres pour prendre un peu d’avance sur les meneurs d’allure. Je me retourne, je ne les vois plus. Je me dis que c’est bon. Je demande à Olivier de me prendre de l’eau et une éponge pour éviter de m’arrêter au ravitaillement des 15km. Il me dit qu’il le fera. Je me retourne encore une fois et je constate qu’il n’y a toujours pas les meneurs d’allure dans les parages. Donc, je suis bien.
Vers le kilomètre 17, je dis à Olivier : « je ralentis, il reste encore plus de 20km, ça va être chaud, chaud… ». Je ralentis donc la cadence.
Arrivé vers le kilomètre 20, sur ma gauche, je vois le meneur d’allure des 4h30 me dépasser à fond, comme une moto pourrait le faire sur l’autoroute quand elle vous double ! Mon mental en prend un coup. Je ne pensais pas les voir si rapidement. Donc, après coup, je me dis que j’ai dû trop ralentir en me croyant en mode balade :-) 
C’est donc le coup de massue. Olivier s’en aperçoit et il me dit : « C’est rien ! C’est encore faisable ! Ne lâche pas ! ». C’est à ce moment-là que son soutien va être très très important ! Il ne me lâche pas, il m’encourage et me pousse dans l’effort physique et mental. Le physique est encore là, mais la tête ne suit plus. Je ne pensais pas pouvoir craquer mentalement.
Au kilomètre 30, mon mental est à zéro et c’est Olivier qui prend le relais sur mon cerveau. L’abandon est pourtant impossible ! Donc j’avance comme un escargot, les gens me doublent et je peux vous dire que mentalement c’est dur, très dur même.
Au kilomètre 35, Olivier me dit : « on fait 8 minutes de course et 2 minutes de marche histoire de se reposer un peu ». Je lui dis que c’est ok. Ça a été les premières 8 minutes mais après, ça a commencé à être très difficile, mais je ne lâche rien ! Je sens que les derniers kilomètres vont être interminables. J’avance et je sens que mes jambes sont lourdes. J’en parle à Olivier. Il me répond : « tu n’as pas les signes d’une personne qui a des crampes, donc cours ! Je trottine, je marche, je trottine, je marche et Olivier ne me lâche pas, il me pousse à chaque kilomètre franchi. Je me dis : « Allez Ludo ! Ne déçois pas ton entourage, fonce, fonce ! Dépasse-toi ! »
Arrivé au kilomètre 40, la douleur mentale est insupportable, mes larmes coulent… Je me dis : « p***in les 2 kilomètres les plus longs vont arriver ». Olivier me dit : « maintenant, ton nouveau défi sera de terminer un marathon en moins de 6 heures, tu ne pourras faire que mieux une autre fois ! ». Je me booste un peu et me dit : « allez Ludo, derniers kilomètres ! ». J’aperçois la ligne d’arrivée, les larmes aux yeux et à bout de souffle. Plein de personnes sont venues nous encourager et elles me redonnent de la force pour franchir la ligne d’arrivée !
C’est là que je m’aperçois de la folie que j’ai eue de vouloir réaliser ce marathon.
Sur ce parcours, les spectateurs sont partout, ils encouragent, tapent dans leurs mains et font la « Ola ».
La ligne d’arrivée est là, à 500 mètres. Devant, mes démons me demandent d’abandonner. Les spectateurs sont des milliers, c’est l’euphorie de la fin et un sentiment d’accomplissement m’envahit. Mais à la ligne d’arrivée, je n’ai aucune larme, j’en suis moi-même surpris. Après avoir pris ma médaille, je rentre à l’hôtel à pied. Et oui, un peu de marche ça fait du bien après une telle épreuve.

Me voilà donc à l’hôtel, je prends ma douche et je me pose sur le lit. Ça frappe à ma porte, c’est le kiné. Ça va me faire du bien. « Merci Pierre-Yves pour tes massages et pour ton sourire ! T’es un super kiné ! ».
Après, je m’assois sur le bord du lit, regarde ma médaille en me disant : « celle-là, je les pas déméritée ! ». Je pense à ma famille et mes amis. Je jette un œil sur mon Facebook et mes larmes commencent à couler toutes seules. Ma famille et mes amis me manquent. Heureusement que je rentre bientôt pour retrouver ma tribu : ma femme, mon fils, ma famille, mes amis, etc…

Fier d’avoir terminé mon premier marathon !
Au final, après 5h50 de course, je suis plutôt fier de moi, même si mon objectif de 4h30 n’est pas atteint. Je relativise. Je n’ai pas chuté, pas vomi, pas eu faim, pas eu de maux de ventre ou de maux de tête et pas été déshydraté. C’est une expérience que je ne suis pas près d’oublier. 
Le corps est soumis à de dures épreuves et le mental, lui, joue une part importante dans la réussite de cet exploit. Les spectateurs sont extraordinaires. Le marathon de Berlin est réputé pour être l’un des marathons les plus populaires. Un jour, je reviendrai courir à Berlin afin d’améliorer mon temps.
En attendant, une chose est sûre, c’est que celui-ci, je l’ai fait !

Un grand merci à tous !
Ma femme, mon fils, ma famille, mes amis, les potes et les connaissances. Un grand merci à la team « Solidaires En Peloton ». Des très belles rencontres, des souvenirs plein les yeux ! Merci à Myriam et ses parents. Oliv, vous êtes super ne changez pas ! Myriam, reste la même, ne change pas et bats-toi, ne lâche rien ! Merci pour votre soutien ! Promis, quand je viens vers chez vous, on se fait un resto !
Un très très grand merci à Olivier Chaigne pour son soutien, il ne m’a pas lâché et je ne le remercierai jamais assez. Quand tu viens à Rouen, contacte-moi, on se fera un truc. (Promis je ne te demanderai pas de me rapporter de l’eau et une éponge et sans oublier de mouiller ma casquette :-)). Merci à Benoît Beaufils et son équipe. La prochaine fois que l’on se verra, j’aurais peut-être le physique d’un kenyan (normand :-)) ! Merci à toi pour ton soutien ! Laurent Tricot, ravi de mettre un visage sur un nom ! Et pour finir, un grand merci à Bernard Gentric et sa femme Danièle. C’est grâce à vous que je me suis mis à courir ! Merci à vous 2 ! Et sans « Solidaires En Peloton » ma vie de sportif serait restée dans un coin, bien rangée au fond de ma tête. Ne lâchez rien ! La SEP m’a donné des ailes ! »

Par Ludovic. (Voir son premier témoignage).

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4 commentaires
12/04/2022 à 18:34 par Eric
Très beau témoignage. On se demande comment un tel exploit 'est possible avec une SEP.

21/02/2022 à 15:26 par nicolasc
Bravo, joli témoignage.
J'ai 40 ans, je faisais du handball, je courais pour m'entretenir. Aujourd'hui, avec a sclérose primaire progressive,je ne peux plus faire 500 m sans boîter, compenser ma jambe gauche faiblarde en désarticulant mon corps et en faisant tout porter sur mon cou ou d'autres parties.
Courir, je n'y pense même plus sur plus de 5 mètres.
Je peux marcher, mais pas longtemps.
Mon kiné me dit qu'il est bon de s'entrainer mais jamais d'aller jusqu'à l'épuisement. Or, je boîte à trébucher, à tomber bien avant d'être épuisé.

J'ai essayé le releveur, mais ça ne suffit pas. alors j'aimerais lire vos idées, vos témoignages, car je n'y crois plus vraiment.

03/08/2019 à 21:12 par Ange4
Bonjour Ludo,
Un immense bravo pour cet exploit et surtout votre mental, j'en suis admirative, vraiment.
Pour ma part, j'ai découvert la course à pied assez tard dans ma vie et j'appréciais énormément le sentiment de liberté que j'éprouvais en courant. Je n'ai jamais couru plus que 15 km car ma jambe droite rapait le sol. Naïvement, je pensais que je ne m'entraînais pas correctement ou que je n'avais pas les bonnes chaussures... Puis sur conseils d'amis et sur recommandation de mon médecin traitant, j'ai consulté un neurologue et après divers examens, j'ai compris pourquoi ma jambe rapait le sol... La SEP et des traitements pour un cancer du sein ont eu raison de mes capacités à courir.
Mes dernières courses se sont terminées par de nombreuses chutes... Depuis, j'ai très peur de courir. J'ai récemment tenté l'expérience en alternant marche et course (si on peut dire) sur une distance de 6 km et ce qui devait arriver arriva, je suis tombée et me suis fait bien mal, donc la peur m'a à nouveau envahie.
J'ai cependant toujours l'envie de courir à nouveau et j'ai même le rêve secret de courir un semi marathon (pour commencer 😉).
Puis-je vous demander des conseils pour une reprise raisonnable et cohérente des entraînements pour atteindre mon objectif et ainsi réaliser mon rêve ?
D'avance, un grand merci pour votre aide et l'attention que vous porterez à mon post.
Angela

01/07/2019 à 15:08 par Legrand Alain
bravo bravo et encore bravo

Je suis moi aussi atteint de la SEP cela fait maintenant 10 ans
Moi aussi avant je faisais beaucoup de sport
Vélo , course à pied, triathlon
Lorsque l’on m’a diagnostiqué la maladie
Du marathon , je suis passé au semi marathon, puis au 10 km pour finir sur 5
Et maintenant j’ ai du mal à faire 1 km sans que la jambe droite traîne

J’aimerai pouvoir de nouveau me lancer un défi de course à pied
Tu me redonnes de l’espoir
Ce que tu as fais est vraiment génial
Et crois moi , je sais ce que tu as pu ressentir en franchissant la ligne d’arrIvé

Pour info
Je vais certainement rencontrer le 8 septembre Bernard Gentric au foulée lindoise

Encore félicitations pour ce que tu as fais


Alain Legrand
J’ai 52 ans

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