La sclérose en plaques,
c'est vous qui en parlez le mieux.
Le 6 août 2014

La sclérose en plaques, par Jé.

« Lorsque l’on a 20 ans,
on n’est pas préparé à entendre
cette réalité. »

Pour des jeunes diagnostiqués en manque de solutions.

« Bonjour à tous,

Il y 10 ans, lorsque le verdict est tombé, je me souviens du vide abyssal dans lequel j’ai sombré.
IRM, PL, flashs de corticoïdes, mes sens touchés de plein fouet essayant de lutter au mieux contre ce déséquilibre, de se rattraper à ce qui leur était familier ; dans un milieu inconnu et inhospitalier de surcroît.

L’annonce de ma sclérose en plaques, s’est faite entre deux portes, comme l’on dit, entre deux patients, dans l’urgence d’un service neurologique rempli de patients de tous ages, en plus ou moins bonne forme, atteints par différentes affections. La nouvelle est tombée comme ça, là, sans méchanceté, sans tact non plus, sans mode d’emploi pour la suite des événements de ma « nouvelle » vie ; bref, le constat était implacable, j’étais désormais malade, c’était grave, j’étais au tapis, j’avais 26 ans.

Ma famille était avec moi, des amis sont passés me voir; dur d’instaurer un dialogue un tant soit peu authentique ; c’était glauque, j’avais mal au mental, ça sentait la fin, ce n’était pourtant que le début.

Je me souviens de ces mots du Chef de service : 
- « Ne vous tracassez pas et surtout, surtout il vous faut du repos, très important le repos ; on récupère 9 fois sur 10 et de toute façon, nous disposons désormais de traitements très performants, allez courage, je vous revois dans 3 mois pour faire le point et n’hésitez pas à appeler si ça ne va pas, d’accord ? »
- « D’accord Monsieur, oui d’accord, mais c’est vraiment une sclérose en plaques ? » Lui ai-je demandé complètement shooté par la cortisone, en regardant, incrédule, la perfusion qui coulait. Je me retournais dans sa direction attendant sa réponse ; il avait déjà quitté la chambre…

De retour chez moi ou plutôt chez mes parents, j’étais seul au lit dans la chambre d’amis, avec mes cachets pour dormir. 
Ma petite amie de l’époque ayant décidée d’aller faire un tour voir si ailleurs l’herbe était vraiment plus verte ; mon père, tourmenté me considérait à présent comme un gosse ou un débile profond, ma mère était anéantie, tout comme mon frère, mes cousins et mes proches, hagards.
Je me sentais seul au monde, complètement brisé et aussi paradoxal que cela puisse paraître euphorique en même temps. Cette euphorie est due, j’ai su ça plus tard, au choc traumatique causé par un tel événement. Les prémices d’une dépression s’installaient gentiment.

Je vais m’arrêter là, je ne suis pas doué pour l’écriture et je ne suis pas là pour m’épancher, grâce à « Dieu » c’est fait, ça tombe bien…

Le message que je souhaite faire passer aux jeunes diagnostiqués qui se sentent complètement perdus est simple : 

Lorsque l’on a 20 ans, on n’est pas préparé à entendre cette réalité. Celle de vivre avec une maladie grave, les sens rivés sur ses maux, en alerte permanente. C’est inacceptable, invivable ; c’est la mer à boire, tant pour soit que pour son entourage. Force et de constater que c’est un fardeau trop lourd à porter et que les neurologues ne sont généralement pas psychologues et ne sont pas formés à l’être… Il y a d’autres disciplines médicales pour ça. (sic).

Ce qui m’a sauvé, c’est un soutien psychologique (J’ai vu un psychiatre pour vomir un bon coup et me reconstruire), un médecin traitant formé et concerné par les désordres neurologiques qui a fait de son mieux pour m’orienter vers de confrères médecins acupuncteurs, kinésithérapeutes-ostéopathes. 
De là, j’ai tissé une toile parmi un réseau de professionnels qui m’ont été et me sont encore aujourd’hui aussi utiles que mon neurologue. (J’en ai vu trois, avant de tomber sur le bon…)

Je ferais simplement part de ma vision de ma sclérose à des jeunes qui manquent de recul sur leur état, sans langue de bois et autre passage de pommade :

• Qu’il y a 10 ans, on me disait qu’on était sur le point de trouver le remède, qu’à ce jour il n’en n’est rien,
• Que la sep peut être bénigne, voire muette, comme elle peut vous coller à terre rapidement,
• Qu’il faut s’armer à fond pour continuer à avancer néanmoins avec cette maladie et se dire que dans le pire des cas on la traînera ad vitam, 
• Qu’il faut en parler à des interlocuteurs fiables, à votre écoute, prêts à vous aider ; bannir les charlatans que vous croiserez forcément un jour sur votre route,
• Qu’il faut réussir à dépasser ses peurs, se pousser à aller de l’avant tout en restant attentif,
• Qu’il faut adopter une vie saine, apprendre à canaliser son stress, faire de l’exercice… (autant que faire se peut).
• Qu’il faut apprendre à prendre sur soi (pas facile, ça) et ne pas trop « stresser » son entourage, mais lui faire comprendre que par moments c’est dur de se battre encore et toujours.
• Que les conseilleurs ne sont pas forcement les payeurs, alors fiez vous à ce que vous ressentez de façon quasi-intuitive, sans sortir trop des sentiers battus.(D’autant que ces réflexions qui s’apparentent à une liste de cuisine, n’engagent que moi, quoi que…)

Pour terminer, je dirais que comme 20% des sclérosés en plaques dits « rémittents », je ne vais pas trop mal au bout de 10 ans (Je boite principalement, j’ai des douleurs et divers « petits » dommages collatéraux), j’ai une compagne, un fils, des amis, je travaille et pars en vacances après ma perfusion mensuelle de corticoïdes, en septembre j’attaque un nouveau traitement mensuel…

J’ai de la chance, pourvu que ça dure…

Carpe diem. »

Par Jé.

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Rediffusion du 24/09/2008.

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