La sclérose en What ?
La sclérose en plaques, c’est plus de 110 000 cas en France
et autant de malentendus sur cette maladie.

Traitements symptomatiques de la sclérose en plaques.

Par le Pr. Jérôme de Sèze
CHU de Strasbourg

« Malgré des traitements de plus en plus efficaces et donnés de plus en plus tôt, certains symptômes peuvent survenir ou persister et nécessitent parfois des traitements symptomatiques.

La fatigue.

La fatigue est un des symptômes les plus fréquents de la sclérose en plaques (SEP). L’exercice physique est très important pour éviter les phénomènes de déconditionnement. Les programmes d’exercices doivent s’effectuer de manière individuelle car une surcharge de travail moteur peut être néfaste. La température de la pièce ou de la piscine en cas de balnéothérapie doit être limitée, la chaleur étant souvent mal supportée par les patients atteints de SEP avec un risque d’aggravation des symptômes. Des programmes de cryothérapie ont été proposés, soit en additif avant une séance de kinésithérapie, soit pour lutter directement contre la fatigue, sans qu’il y ait cependant de preuve de leur efficacité. Enfin, le travail doit être réparti dans la journée avec l’aménagement systématique de périodes de repos.

Différents traitements sont proposés pour la prise en charge de la fatigue au cours de la SEP mais un certain nombre d’essais ont été effectués de façon non contrôlée, sur de petites cohortes et de courtes périodes. La réponse à telle ou telle thérapeutique apparaît par ailleurs hautement individuelle. Le traitement le plus utilisé est l’amantadine (Mantadix®). Le modafinil (Modiodal®) a été testé dans deux études pilotes avec une efficacité partielle. Cependant, une récente étude française, n’a pas confirmé ces résultats préliminaires, ne montrant pas d’effet sur la fatigue avec simplement une amélioration des symptômes chez les patients ayant, de façon associée, une somnolence diurne.

La spasticité (raideur).

- Traitement médicamenteux.

Les principales molécules utilisées sont le baclofène (Lioresal®), le dantrolème (Dantrium®) ou la tizanidine (Cirdalud®), ce dernier traitement étant obtenu seulement grâce à une autorisation transitoire d’utilisation (ATU). La principale difficulté de ces traitements réside dans le fait qu’un certain degré de spasticité est souvent nécessaire pour garder un minimum de tonus musculaire. Ainsi, seul le patient et l’évaluation du bénéfice fonctionnel permettront de juger de la dose efficace permettant d’éviter la douleur liée à la spasticité. En cas d’insuffisance d’efficacité de ces traitements, la pose d’une pompe à baclofène peut se discuter au cas par cas avec une période de test durant laquelle un cathéter est implanté dans la colonne vertébrale afin de pouvoir tester différentes doses et juger de l’efficacité du traitement avant la réalisation d’une implantation définitive.

En cas de spasticité localisée, l’injection de toxine botulique peut être proposée, notamment lorsqu’il existe un varus équin. L’intérêt de cette thérapeutique est son caractère réversible. En revanche, il n’y a pas de place pour la toxine botulique en cas de spasticité diffuse. Les dérivés du cannabis et des cannabinoïdes (comprimés, gouttes ou spray) ont été proposés comme traitement de la spasticité douloureuse avec des résultats encourageants mais il n’y a pas, pour l’instant, de remboursement de ces molécules en France. Des études complémentaires sont prévues prochainement.

- Rééducation.

Différentes techniques de rééducation ont démontré leur efficacité en diminuant la spasticité sans réduire la force musculaire. Elle reste un soutien majeur à l’utilisation de traitement médicamenteux.

Les troubles vésico-sphinctériens et sexuels.

- Les troubles urinaires.

Deux types de troubles peuvent se rencontrer : la difficulté pour uriner (dysurie, voire rétention) et l’impériosité, voire les fuites urinaires (le plus souvent liées à une hyperactivité vésicale).

Dysurie/rétention urinaire.

Il n’existe pas de médicament parfaitement en mesure de restaurer la vidange vésicale mais l’efficacité des alpha bloquants (Xatral®, Omix®, Zoxan®…) a été suggérée par plusieurs études. Malgré l’existence d’un effet intéressant de ces traitements, le sondage intermittent reste indiscutablement la technique qui s’approche le mieux de la miction normale. Ce traitement pose le problème de son acceptation par le patient, malgré l’amélioration très nette du matériel de sondage ces dernières années notamment avec les « mini-sondes ». Quand cela s’avère nécessaire, l’utilisation de la toxine botulique en association ou non aux auto-sondages apporte un confort important au patient en termes de continence et a l’avantage d’être réversible en quelques mois.

Impériosités/fuites.

Le traitement principal de ce symptôme repose sur les anticholinergiques. Leur efficacité initiale est excellente mais peut s’estomper avec le temps. Les principales molécules, prescrites à la dose de 1 à 2cp/j, sont l’oxybutinine (Ditropan®, Driptane®) ou chlorure de Trospium (Ceris®). Le principal effet secondaire de ce traitement est la sécheresse buccale. Il faudra s’assurer (éventuellement à l’aide d’une échographie pré et post-mictionnelle) de l’absence de résidu post-mictionnel qui augmente le risque d’infection Enfin, la place de la chirurgie dans ce cadre est limitée aux cas où les sondages deviennent difficiles. Il s’agit alors d’une urétérostomie cutanée transiléale (intervention de Bricker). La neurostimulation sacrée S3 implantée est également proposée dans certains cas.

- Les troubles digestifs.

Les troubles digestifs dans la SEP n’ont pas de spécificité et sont, dans la grande majorité des cas, une constipation. Cette constipation est identique à celle retrouvée dans les maladies neurologiques et est souvent multifactorielle (ralentissement de la motricité colique, défaut d’hydratation, traitements de type anticholinergique…). Les solutions apportées vont donc être basées sur des « petits moyens » tels que la prise d’eau Hépar, de jus de pruneau… en plus d’une alimentation orientée et équilibrée. Il pourra être proposé des laxatifs voire des lavements mais ces prescriptions doivent être limitées dans le temps. L’incontinence anale est, en revanche, plus rare mais très invalidante. L’évacuation rectale régulière par des suppositoires d’Eductyl® peut apporter une aide intéressante. Les tampons obturateurs, remboursés par la Sécurité sociale, peuvent offrir un certain confort aux patients, notamment dans leur vie quotidienne.

- Les troubles sexuels.

Des troubles sexuels peuvent survenir, aussi bien chez la femme que chez l’homme. La SEP touchant préférentiellement les adultes jeunes, ce symptôme peut avoir des conséquences plus importantes sur le couple et il est important d’en parler avec son neurologue. Chez la femme, il s’agit le plus souvent d’une baisse de sensibilité ou de douleurs. Les douleurs peuvent être traitées par les mêmes molécules que les autres douleurs neuropathiques. Pour les autres symptômes, il peut être proposé des crèmes lubrifiantes et l’utilisation de vibrateurs intravaginaux semble améliorer la sensibilité locale. Chez l’homme, la principale plainte concerne les troubles érectiles. Un seul traitement à l’AMM dans cette indication (Edex en injection intracaverneuse) mais les molécules plus récentes (Viagra®, Levitra® et Cialis®) ont démontré leur intérêt dans la SEP mais ne sont pas remboursés. L’ensemble de ces mesures thérapeutiques n’a de sens qu’accompagné d’une prise en charge psychologique, ces symptômes s’accompagnant souvent d’une baisse de la libido et d’un isolement familial et conjugal du patient.

Les douleurs et manifestations paroxystiques.

La douleur dans la SEP est un symptôme fréquent, souvent banalisée ou ignorée. Le traitement de ces douleurs n’est pas spécifique à la SEP mais commun à toutes les douleurs neuropathiques. Comme souvent pour les douleurs neurologiques, les antalgiques classiques sont peu efficaces. Il faut utiliser les antalgiques de type benzodiazépines ou anti-épileptiques. Lorsqu’il s’agit de paresthésies, le Rivotril est assez efficace. Ces douleurs peuvent également être améliorées par les antiépileptiques de type Neurontin®, Lyrica®, Cymbalta®… Le suivi et l’accompagnement psychologique doivent faire partie du traitement afin de vérifier l’observance et l’efficacité de celui-ci. Les douleurs liées à une atteinte du nerf trijumeau sont habituellement traitées par Tegretol®.

Les troubles cognitifs.

Des troubles cognitifs peuvent être présents dans la SEP. Il ne s’agit pas de perte de mémoire ou d’orientation comme dans la maladie d’Alzheimer, mais il peut s’agir de troubles de la concentration ou de rapidité d’exécution. Ils peuvent avoir des conséquences sur le plan professionnel. Il n’y a pas de traitement médicamenteux pour ces troubles, en dehors de ceux de la maladie en elle-même qui freinent leur évolution. Il est donc proposé une réadaptation cognitive individuelle ou collective qui a démontré récemment ses bienfaits sur la vie quotidienne. »

Pr. Jérôme de Sèze.
CHU de Strasbourg.

Article publié en juillet 2020.