La sclérose en What ?
La sclérose en plaques, c’est plus de 110 000 cas en France
et autant de malentendus sur cette maladie.

Les troubles sexuels dans la sclérose en plaques.

Dr. Maria Carmelita Scheiber-Nogueira
Cabinet de Neurologie et Neuro-Urologie - Service de Neurologie et Service d’Urologie au CHU Lyon Sud.

La sexualité reste un facteur primordial de toute relation amoureuse : le partage physique est important dans la satisfaction conjugale de tout individu. Plusieurs pathologies peuvent être responsables de l’apparition de troubles sexuels. La prise en charge des troubles sexuels est parfois difficile en raison des notions de honte, de tabou et surtout par un important manque d’information avec des fausses idées et des superstitions liées à la sexualité véhiculées dans toutes les cultures. Les troubles sexuels sont souvent sous-estimés mais peuvent affecter plus d’un patient sur deux, femme comme homme, et ont un impact considérable sur la qualité de vie.

Lors d’une consultation, les malades hésitent toujours à s’exprimer par pudeur mais aussi par peur de la réponse médicale. Dans toutes les sociétés, la représentation de la sexualité est centrée autour de la jeunesse, de la forme physique et de la beauté. Ainsi, l’âge, le handicap, la maladie sont souvent considérés comme des motifs « d’exclusion » de toute pratique sexuelle.

Dans la sclérose en plaques (SEP), les difficultés sexuelles font partie de la maladie et peuvent apparaître très précocement dans l’évolution de la maladie voire même en être un des signes révélateurs. Les troubles sexuels ne sont pas, en eux-mêmes, un facteur de gravité mais sont un important indicateur de perte de qualité de vie.
Les troubles sexuels dans la SEP sont marqués par un polymorphisme en raison d’une variabilité de localisation des lésions démyélinisantes au niveau médullaire ou cérébral liées à la maladie, de l’évolution de la pathologie, (par des poussées successives, formes progressives) et surtout par l’association très fréquente des troubles sexuels à l’existence de troubles urinaires et aussi ano-rectaux sans oublier la possibilité de lésions gynécologiques ou urologiques. Ces lésions, liées à l’histoire naturelle de la vie de toute personne peuvent coexister chez un patient qui présente une SEP (par exemple : des problèmes prostatiques chez l’homme ainsi que des complications gynécologiques chez toute femme). Les troubles sexuels dans le cadre de la SEP peuvent être liés directement aux lésions neurologiques provoquées par les plaques de démyélinisation. Mais, les difficultés sexuelles peuvent aussi être liées ou aggravées en raison des différents changements physiques qui affectent la réponse sexuelle comme, par exemple, la fatigue, l’existence de troubles urinaires ou intestinaux, la spasticité, les douleurs, les difficultés de coordination ou l’existence de tremblements. Ces difficultés sexuelles, de plus, vont s’installer chez des patients qui ont des valeurs sociales, culturelles et religieuses propres à leur histoire personnelle.

L’apparition de troubles sexuels est souvent associée à une baisse de l’estime de soi ainsi qu’à un sentiment de dépréciation (notion de détérioration physique) et à un syndrome dépressif qui s’aggrave de manière significative dès l’apparition de toute difficulté sexuelle.

Chez l’homme et chez la femme ayant une SEP, les difficultés sexuelles peuvent toucher toutes les phases de la sexualité (désir, excitation, plaisir et orgasme) et sont une source fréquente de conflit dans un couple et à l’origine d’une mésentente qui peut être un des facteurs primordiaux d’installation d’un syndrome dépressif pouvant conduire à une séparation (l’existence de troubles sexuels est quasi toujours citée dans les causes de divorce). 

Il n’existe aucune corrélation de la présence des troubles sexuels avec la durée de la maladie, le niveau du handicap, la perte de mobilité ou le nombre de poussées présentes au cours des douze derniers mois. Cependant, l’association des troubles sexuels avec des troubles urinaires et /ou des troubles intestinaux est très fréquente et peut toucher plus de la moitié des patients.

La prise en charge des troubles sexuels dans la SEP doit s’adapter à chaque patient et à chaque situation est à prévoir : après l’analyse des symptômes sexuels, il faut toujours rechercher différentes pathologies associées comme, par exemple, l’existence d’infections urinaires répétées, de troubles prostatiques chez un homme ou des complications liées à la grossesse ou à l’accouchement chez une femme. Certains traitements peuvent avoir des effets négatifs dans les réponses sexuelles et ceci doit toujours être discuté et analysé par votre médecin.

Le contexte familial et conjugal est primordial dans la prise en charge des troubles sexuels de tous les patients vivant en couple : un interrogatoire suivi d’une discussion avec le couple sont des conditions obligatoires pour bien comprendre la situation sexuelle dans sa globalité. Cette discussion permettra de comprendre le retentissement du symptôme sexuel actuel sur chaque partenaire et sur le fonctionnement du couple. Cette analyse de la vie du couple est primordiale car l’apparition d’une maladie chronique, souvent évolutive, avec installation progressive d’un handicap va forcément modifier les relations de couple dont le mode de fonctionnement va être perturbé.

Sexualité et sclérose en plaques chez la femme.

Historiquement, la sexualité féminine est toujours passée en 2ème plan et peu d’études ont été publiées sur la sexualité féminine dans les maladies neurologiques. Pourtant, dans une pathologie telle que la SEP, l’apparition des troubles sexuels a un retentissement psychique majeur surtout chez des patientes jeunes qui sont en période de formation et de consolidation d’une vie de couple et à l’âge de procréation. La fréquence des difficultés sexuelles est très importante et selon l’âge et l’évolution de la pathologie, 70 % des patientes peuvent présenter des soucis sexuels dans le cadre de la SEP.

Les troubles sexuels les plus fréquemment décrits dans la SEP sont :
- Une diminution de la lubrification vaginale.
- La diminution voire perte de la sensation orgasmique.
- Baisse de la libido.
- Importante diminution de la sensibilité de la région génitale et en particulier vaginale.
- Apparition de troubles sensitifs à type paresthésies (fourmillements, picotements, échauffement) dans la région génitale.
- Faiblesse ou incapacité à contrôler la musculature périnéale.         

Une plainte très fréquemment évoquée est celle des rapports sexuels douloureux (la dyspareunie). Ils sont liés à l’association de plusieurs facteurs : la présence de troubles sensitifs locaux, la perte de la lubrification vaginale, l’existence de douleurs locales liées aux problèmes urinaires ou ano-rectaux. Les rapports sexuels désagréables voire douloureux conduit très fréquemment à des manœuvres d’évitement et d’une importante réduction de la libido. Celle-ci est probablement à l’origine de la baisse de l’activité sexuelle rencontrée chez le couple où la femme présente une SEP.

La SEP n’est pas en cause dans les troubles de la fertilité.

L’apparition de troubles sensitifs dans la région génitale doit amener a un examen gynécologique pour éliminer toute pathologie locale nécessitant un traitement adapté. Si aucune cause locale existe, il faudra penser à discuter avec votre neurologue pour discuter l’intérêt d’un traitement par voie orale.

Différents traitements locaux peuvent être utilisés et sont souvent très efficaces pour les problèmes de lubrifications, très fréquentes et présentes parfois dès les premières années de la maladie.

Sexualité et sclérose en plaques chez l’homme.

Le symptôme le plus fréquent est lié à une perte de la qualité des érections. Au début, cette symptomatologie est inconstante mais, progressivement, ce tableau évolue vers une perte totale et permanente de l’érection Chez une grande majorité des malades les érections nocturnes, et souvent, l’érection matinale, restent présentes et c’est lors des situations érotiques ou au moment des rapports que l’érection est de mauvaise qualité voire absente. Ceci va souvent conduire à la perte de la confiance en soi avec une angoisse face à toute situation de stimulation érotique et une mise en situation d’échec lors des rapports sexuels. Après discussion avec votre neurologue, différents traitements par voie orale ou locale peuvent être proposés en cas de troubles érectiles.

Les troubles de l’éjaculation peuvent aussi être présents et associés ou non aux difficultés d’érection. Le plus souvent, au début, il existe une éjaculation prématurée qui est secondaire à une instabilité de l’érection. Chez certains patients, une éjaculation rétrograde partielle ou totale peut apparaître.

Les problèmes de fertilité ne sont jamais liés directement à la SEP ni aux traitements actuellement utilisés, mais se rencontreront s’il n’existe pas d’éjaculation : une prise en charge spécifique est nécessaire.

D’autres difficultés sexuelles ont été décrites chez les patients présentant une SEP : troubles de la sensibilité dans la région des organes génitaux (diminution de la sensibilité locale ou apparition de paresthésies). Chez l’homme, la diminution de la libido est souvent en rapport à une fatigabilité ou à l’existence des troubles sensitifs locaux. Des traitements utilisés pour les troubles sensitifs peuvent être nécessaires et votre neurologue pourra vous orienter.

Il n’existe pas une prise en charge commune à tout patient souffrant de SEP présentant des difficultés sexuelles. Avant de décider d’un traitement adapté à votre cas, différents facteurs doivent être pris en compte et analysés conjointement : les pathologies associées, traitements en cours, contexte socioprofessionnel, contexte familial et conjugal, type de symptôme sexuel. Il sera bien entendu tenu compte de l’existence des éventuels handicaps et, de s’adapter non seulement aux possibilités mais aussi aux souhaits des partenaires. La prise en charge sexologique du couple est très importante pour une analyse pertinente des retentissements du symptôme sexuel sur le malade, le partenaire sain et le couple et ainsi déterminer le(s) traitement(s) le plus adapté(s).


Dr. Maria Carmelita Scheiber-Nogueira
Cabinet de Neurologie et Neuro-Urologie
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Service de Neurologie et Service d’Urologie
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