« Février 2005 : quelques fourmillements dans la jambe et le pied qui remontent jusqu’au milieu du dos… un matin au réveil.
Je me dis que ce n’est rien et que j’ai dû prendre une mauvaise position ! Une petite semaine après, je n’ai pas d’amélioration et les fourmillements sont devenus douloureux : je me décide à consulter, plus parce que je dois partir rejoindre mon chéri au ski dans quelques jours, que par réelle inquiétude.
Une radio et un doppler plus tard, ma généraliste me trouve une lombaire coincée. Je prends consciencieusement mes anti-inflammatoires et mets ma ceinture dorsale et puis plus rien, quasiment du jour au lendemain !
Je peux partir pour mon grand week-end de ski et j’oublie… Pas pour très longtemps…
Fin mars 2005, je suis en vacances, de vraies vacances, comprenez : 15 jours !
Le premier jour de ces vacances tant attendues, je me réveille nauséeuse et incapable de me lever tellement la pièce tourne autour de moi ! Je pense à une intoxication alimentaire : vertiges, jambes faibles, nausées… Je tiens 4 jours comme cela et le 5ème, je vais chez le médecin, plus exactement, mon chéri m’emmène chez le médecin. Elle peut à peine m’ausculter tellement j’ai peur de vomir et de tomber. Elle me laisse presque une heure allongée et oh miracle, cela se calme. Je repars avec une ordonnance de Tanganil®, de Primperan® et un RDV chez un ORL. Exit l’intoxication alimentaire, il s’agit certainement d’un problème d’oreille interne !
Je pense en ressortant que je n’ai pas de chance et que je les cumule… Si j’avais su ! Mes vertiges se sont calmés, par contre, je titube un peu, mes jambes s’emmêlent, je me cogne souvent et je n’arrive plus à lever le bras droit, j’ai certainement dû me coincer un nerf à force de me cogner partout ! Je pense alors que j’avais vraiment besoin de ces vacances, car je mets ces symptômes sur le dos de la fatigue accumulée. J’enrage de perdre du temps à aller chez l’ORL alors que je suis en congés et que je voudrais bien en profiter un peu ! Lors de la consultation, je m’aperçois que je ne tiens pas sur une jambe et que je n’arrive pas à marcher un pied devant l’autre comme sur une ligne droite, l’ORL fait une drôle de tête et sa mine continue de s’allonger quand je lui explique que je ne peux pas toucher mon nez avec mon doigt car je ne peux pas lever mon bras. Je passe ensuite les tests pour vérifier si j’ai un problème d’oreille interne et là, premier choc, l’ORL me demande si j’ai déjà pensé à consulter un neurologue. Je ne sais pas (encore) vraiment ce qu’est un neurologue, mais je sais que l’on n’en voit pas un pour quelque chose de bénin !!! Je ressors de chez l’ORL, avec l’impression que le ciel ne va pas tarder à me tomber sur la tête, mais je ne fais rien pour autant.
Les symptômes régressent et disparaissent en une dizaine de jours alors, je mets soigneusement mon petit mouchoir sur ce qu’il m’a dit et mon angoisse…
Je passe 2 mois comme si de rien n’était, j’ai déjà presque tout oublié même s’il m’arrive des petites choses bizarres : l’impression d’une décharge électrique lorsque je penche la tête et des fourmillements qui reviennent par intermittence (encore cette fichue lombaire), de violentes démangeaisons au niveau du bras (probablement, une allergie)…
Second choc : une collègue m’appelle pour me dire qu’on lui suspecte une sclérose en plaques et qu’elle passe des examens. Je m’inquiète pour elle mais ma propre angoisse ressurgit lorsque mon compagnon m’interroge « tu ne m’avais pas dit que ses symptômes ressemblaient à ceux que tu as ? » Je ressors mon mouchoir en lui répondant que nos symptômes sont un peu similaires, mais que je ne peux pas être malade car je me sens en pleine forme, la preuve, si j’étais malade, j’aurais perdu du poids non ? Merci, mon petit mouchoir de recouvrir mes incertitudes avec autant d’insouciance… pour très peu de temps et je ne le sais pas encore.
Mi-mai, je me réveille avec les mêmes sensations qu’en mars : vertiges, nausées, problèmes d’équilibre et en prime, je ne vois quasiment plus rien de l’œil droit, à part une espèce de tâche grisâtre et ma jambe droite refuse de bouger. Là, je m’inquiète vraiment et mon compagnon m’emmène aux urgences : on arrête de se voiler la face, il se passe quelque chose de bizarre et ce n’est pas du « bon bizarre ».
Aux urgences, j’attends très peu, inquiétant : la salle d’attente est pleine et je passe presque devant tout le monde ! Je passe une heure à faire plein de tests qui pourraient êtres amusants si je ne sentais pas que je suis très près d’une mauvaise nouvelle : on me chatouille les pieds, les ongles des mains, on me cogne les articulations avec un petit marteau, on me pique la peau… Je trouve que l’interne qui m’examine commence à faire la même tête que l’ORL. À ce moment, j’entends des éclats de voix dans le couloir : c’est mon compagnon que l’on n’a pas laissé m’accompagner et qui se demande au bout d’une heure ce qu’il m’arrive. L’interne le laisse rentrer dans la salle d’examen et en profite pour s’esquiver.
Elle revient quelques minutes après, accompagnée d’un homme, âgé, l’air très sérieux et très responsable. Il se présente comme étant professeur et m’annonce qu’ils vont m’hospitaliser pour me faire passer des examens complémentaires. Je me tasse littéralement de peur et docilement, je me laisse emmener au 3ème étage, on me fait asseoir sur le lit, on demande à mon compagnon d’aller me chercher des affaires, je ne réagis plus, je ne parle plus, je ne ressens plus rien ! Je suis assise comme un pantin sur le bord du lit trop haut, les pieds dans le vide !!! On me conseille de m’allonger car je manque de tomber à cause d’une grosse crise de vertige, j’enlève mes chaussures et toujours aussi docilement, je m’allonge ! Et là, je prends conscience que personne ne m’a dit pourquoi je suis là, quels sont ces examens complémentaires, ni même dans quel service je suis… Cela me fait réagir, je commence à m’énerver devant le mur de mots qui sont censés m’apaiser mais qui ne m’apportent aucune réponse.
Un médecin arrive et je le suis jusque dans un bureau où il me fait asseoir avec mon compagnon, il commence à me parler mais je ne comprends rien « IRM ? PL ? ECBU ? Qu’est-ce que c’est ? Nécessité d’exploration, Pourquoi ? MAIS QU’EST-CE QUE J’AI ? VOUS PENSEZ À QUOI ? Démyélinisation de la moelle épinière » m’assène-t-il, certainement excédé par mes questions et mon ton de plus en plus agressif !, Dans ma tête, tout s’emballe : démié… quoi, je ne sais pas ce que sait, cela me terrorise, mais moelle épinière, je sais ce que c’est et là je réalise que je suis en chaussettes et que je n’ai pas remis mes chaussures, je viens d’apprendre que j’ai certainement quelque chose de grave et je n’ai pas mes chaussures… je panique et je refuse de rester… je signe en 2 minutes, la décharge, pars en courant chercher mes chaussures et je me sauve de cet endroit, peut-être crois-je que ce que je viens d’entendre s’effacera comme par magie…
Ma généraliste a pris le relais, j’ai passé en externe un scanner, une IRM cérébrale et une IRM de la moelle, j’ai vu un neurologue et le verdict de la sclérose en plaques est tombé officiellement le 27 juin 2005 et quatre jours après, je faisais mes premiers bolus de cortisone, les premiers d’une longue série. Presque 3 ans après le début de la maladie et un an à refuser le traitement, je viens de faire la 5ème perf’ du fameux « anticorps monoclonal humanisé » : je m’accroche (souvent aux murs…), pour mon compagnon qui est merveilleux, mes parents, mes amis et aussi pour mes deux chiens (on en aperçoit un sur la photo…) qui ne comprennent pas pourquoi leur maîtresse ne les emmène plus en forêt pour aller courir avec eux.
Aujourd’hui, je sais une chose, je hais cette maladie et j’essaye de ne pas me haïr d’avoir un jour de février 2005, croisée son chemin. »
Par Aline - 35 ans.
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Je suis vraiment désolé pour l'auteure de cet article, quelle tristesse. J'ai vu les autres commentaires et les gens ne prennent pas le temps de tout lire.
Aline l'auteure de cet article est dcd 2013, évitez de mettre des messages, adressé à elle comme si elle était en forme.
Cet article m'a fait prendre conscience que diagnostiqué la sep est compliquée.