La sclérose en plaques,
c'est vous qui en parlez le mieux.
Le 20 avr. 2019

La sclérose en plaques vue par Claire.

« Ma vie se déroule en constante
adaptation de ma maladie. »

« Bonjour,

Aujourd’hui, je fête mon 24ème anniversaire. La première pensée que j’ai eue ce matin concernait la sclérose en plaques (en vérité, c’était la troisième : les deux premières concernaient mon copain et ma famille). J’ai réalisé que non seulement j’avais 24 ans (que le temps passe vite) mais également que cela faisait 8 ans que j’étais malade.

En parlant d’anniversaire, le diagnostic de sclérose en plaques a été fait le jour d’anniversaire de celui de ma maman. Quand le neuro me l’a annoncé, je me suis imaginée alitée, avec une couche, avec une bavette…, que ma vie allait s’arrêter là, à l’aube de mes 20 ans, alors que je n’étais encore qu’aux balbutiements de ma vie d’adulte.

A posteriori, nous avons retracé l’histoire de ma maladie : quand sont apparus les premiers signes, comment ils se sont manifestés…En réalité, j’avais, depuis mes 16 ans, des séquelles sensitives et motrices de poussées antérieures, ce que je prenais alors pour une bizarrerie de mon corps, pour une sensibilité fluctuante, pour une faculté en plus (je me vantais de ne pas ressentir certaines douleurs : « même pas mal »)…

Un été, suite à un choc (physique et psychologique), j’ai perdu la vue de l’œil droit, un voile blanc opaque m’empêchait de voir. Mon ophtalmo de l’époque (j’en ai, bien évidemment, changé par la suite) a pensé rapidement à la sclérose en plaques, mais n’a pas partagé ni envisagé ce diagnostic, me considérant trop jeune pour ce genre de maladie. J’ai été très en colère : je me suis demandé comment je serais aujourd’hui si j’avais été prise en charge plus tôt, la réponse étant si incertaine que me suis dit que ce n’était pas la peine de se battre contre quelque chose de fait et que je ne pourrais pas changer. Cela n’a pas été la première, ni ne sera la dernière, bêtise d’un médecin face à moi.

Après IRM et ponction lombaire qui montraient une sclérose en plaques assez ancienne et très active (voire « agressive »), j’ai été immédiatement traitée par un médicament par injection sous-cutanée (Copaxone®), mais, suite à plusieurs poussées plus ou moins invalidantes, plus ou moins longues, plus ou moins inquiétantes pour mon entourage et moi-même, je bénéficie d’un autre traitement, en perfusion à l’hôpital (Tysabri®), depuis trois ans bientôt. Les cures se passent relativement bien (même si le programme « nausées et fatigue » est très souvent au rendez-vous). Je ne me sens pas particulièrement mieux (car quelques poussées ou réveils de séquelles ont eu lieu) ni particulièrement moins bien.

Au début de la maladie, je vivais contre, je me suis battue, je l’ai refusée, je voulais vivre comme tout le monde, vivre comme une jeune fille de 20 ans : s’amuser jusqu’au petit matin, se coucher à minuit et se réveiller juste assez tôt pour aller à la fac, aller manger chez les uns et les autres… Je me suis assez vite rendu compte que ce n’était pas possible. Maintenant, je vis avec, j’accepte ce qui m’arrive (avec plus ou moins de facilités, c’est vrai). Je vis ma vie au mieux de ce que j’en attends, je fais des projets pour l’avenir, je réalise lentement mes rêves…

Tout cela est possible parce que je ne suis pas toute seule, je suis très bien entourée par mon copain, par ma famille, par mes amis, par mes profs, par mes futurs collègues… Je sais que je n’ai pas la vie normale que j’aurais souhaité avoir, mais je fais ce que je peux pour faire ce que je veux, même s’il faut parfois faire des concessions et accepter beaucoup de choses qui sont désagréables, comme avoir besoin d’aide humaine ou matérielle. J’arrive, la plupart du temps, à trouver l’équilibre juste, à ne pas trop tirer sur la corde et à profiter de ce qui m’est offert.

Cela peut paraître prétentieux de dire cela, mais je pense que c’est pas mal de s’auto-complimenter parfois : je suis contente d’être ce que je suis aujourd’hui avec la sclérose en plaques, je suis en 5ème et dernière année de psychologie, j’ai un petit ami qui m’aime et que j’aime, j’ai une famille adorable et présente, j’ai plein d’amis qui m’apprécient (enfin j’espère), j’ai d’ambitieux projets professionnels et personnels…

Je vis bien et je suis heureuse, malgré mes difficultés à me servir un chocolat chaud, à ouvrir le bouchon du tube de dentifrice, à me laver les dents, à marcher jusqu’à l’arrêt de bus (béquilles et fauteuil roulant m’aident à avancer parfois), à prendre le bus (j’alimente la mauvaise réputation des jeunes « fainéants » de la fac de lettres qui sont « toujours » bourrés), à prendre en note les cours à la fac (heureusement que les Notebook existent), à aller aux toilettes pendant le temps imparti des pauses (3 minutes top chrono), à rester concentrée et alerte durant les heures de cours (« je ne me fous pas de ce que vous dites, Monsieur, je suis juste malade et fatiguée »), à me souvenir des rendez-vous donnés et des personnes rencontrées (grande source de quiproquo), à réagir de façon adéquate dans une conversation, à manger (plus par manque d’appétit), à me coucher tard et à faire la fête (« tu ne viens plus aux soirées ?! »)…  Plus les baisses de moral, les difficultés de choix, les phases d'excitation ou de fatigue, la perte ou le manque d'appétit… et les fameux symptômes de la sclérose en plaques : névrites optiques, céphalées, nausées, constipation, diarrhée, spasmes, fuites urinaires et fécales, insensibilités ou hypersensibilités, sensations de décharges électriques, engourdissements, fourmillements, tremblements, fausses routes, parésie, douleurs...

Actuellement, ma vie se déroule en constante adaptation de ma maladie à mon environnement, à mes projets, à mes envies, à mes lubies, et cela n'est pas toujours évident à faire car j'ai encore la fougue et l'insouciance d'une jeune fille, que je dois confronter aux réalités d'une malade. Ma famille et mes proches me soutiennent dans mes projets, m'aident à trouver des solutions (ils sont terriblement ingénieux, prêts à participer au concours Lépine), à abandonner un rêve trop irréalisable, à adapter mes envies. Ils sont présents à chaque instant, dans les bons moments où je fais des progrès, où j'avance dans ma vie, où je réalise un projet, mais aussi dans les mauvais moments où je perds de l'indépendance, où je vais mal physiquement et/ou moralement, quand l'avenir ne signifie plus rien pour moi. Sans eux, je ne serais pas comme je suis aujourd'hui, je ne serais pas la tête pleine de projets pour le futur, je n'aurais pas autant envie de vivre que maintenant, malgré les douleurs, malgré les incapacités, malgré les traitements, malgré le handicap.

Ce témoignage est un moyen pour moi de remercier tous mes proches, de dire que je suis extrêmement fière d’eux et très honorée de leur présence à mes côtés dans ce quotidien pas évident. Bizarrement, la maladie nous a appris à profiter de chaque instant, à être plus proche, à relativiser ce qui arrive, à se soutenir (et pas que lorsque cela me concerne)…

Je remercie aussi Arnaud pour tout ce que tu fais, j'ai dévoré ton livre, j'ai ri et pleuré en le lisant, car tu es si étrangement proche de moi, comme je me retrouve dans chaque témoignage de ce site. Je remercie l'association Notre Sclérose pour son dynamisme et sa volonté, pour le courage qu'elle me donne...»

Par Claire.

❤️ Soutenez l'association Notre Sclérose ! (Exemple : un don de 20€ ne vous coûte réellement que 6,80 €).
 

Rediffusion du 03/03/2010.

15 commentaires
20/04/2019 à 11:13 par Magali di mauro
Pboujour à tous tu parles d un libre as tu les coordonnées pour je suis perdue face à vette maladie un grand merci

13/08/2013 à 18:50 par zou
Bonjour Claire,

Je pense que je ne ferai pas la PL: j'ai bêtement attendu que le neurologue ou le chu m'appellent. Non pas que je n'en ai pas envie, mais bientôt la fin des vacances (je suis prof) et jai envie d'être en forme pour la rentrée; pas en arrêt maladie! j'ai pris un rdv pour mes irm de contrôle fin août (je me souviens que le neurologue m'avait d'en faire dans trois mois)et j'ai également pris rdv avec un autre neurologue spécialisé dans la SEP. j'ai déjà vu deux neurologue et ils m'ont déçu!
Dans ma première IRM cérébrale, le radiologue a trouvé trois hypersignaux et les neurologues deux: d'après eux, ils sont anciens mais je ne sais pas comment ont peut savoir qu'ils sont anciens?
MERCI beaucoup pour tes précieux renseignements et te souhaite bon courage!

13/08/2013 à 10:35 par Claire
Bonjour Zou,

D'après mes souvenirs de ce que m'a dit le neurologue au moment du diagnostic et si je relis les premiers comptes-rendus, j'appelle SEP assez ancienne et très active (voire "agressive") :
- ancienne car de multiples lésions anciennes et actives au niveau médullaire et cérébrale (dès cette première IRM, les critères diagnostiques de la SEP étaient réunis)
- très active car multi-symptomatique pour la poussée diagnostique : paresthésie des 4 membres et de l'abdomen et du thorax, névrite optique rétro-bulbaire de l'oeil droit, atteinte de la motricité fine, troubles de l'équilibre
- agressive car la PL retrouvait un profil oligoclonal très augmenté avec de nombreux lymphocytes et un index IgG très élevé.
Je pense que tu devrais rappeler l'hôpital ou si tu es sûre de changer de ville, prendre déjà contact avec un neurologue ou le service de neurologie de ta future ville pour faire établir le diagnostic là-bas. Je comprends tout à fait que cela te fasse peur, cela n'est déjà pas très évident si on oublie la SEP. Pour me rassurer, j'ai téléphoné à l'association de patients SEP de la région pour demander des contacts avec les différents professionnels de santé dont j'allais avoir besoin pour mon suivi. Ainsi, je savais que ce seraient des praticiens sensibilisés à la maladie.
J'espère que tu auras les réponses que tu attends.

Bon courage à toi et merci,

Claire.

12/08/2013 à 20:34 par zou
bonjour Claire,
quand tu dis "Après IRM et ponction lombaire qui montraient une SEP assez ancienne et très active (voire « agressive »)" tu pourrais m'en dire plus? Je suis en attente de diagnostique et je n'arrête pas de faire un retour en arrière en relevant toutes les "bizarreries de mon corps"pour la PL j'attends tjs un appel du chu (1 mois et deux semaine que j'attends!
tout comme toi je vais changer de ville et cela me fait peur sachant que je n'ai tjs pas de diagnostique!
Bon courage et j'ai bien hâte de lire ton prochain témoignage! Bravo pour tous tes projets!

12/08/2013 à 14:05 par Claire
Bonjour Sébastien,

Merci pour votre commentaire.
Je ne sais pas si j'arriverais à donner de mes nouvelles en résumé, tant les choses ont évolué en quelques années.
Et bien, oui, mon projet s'est enfin concrétisé : à la rentrée universitaire prochaine, je serai inscrite en 2ème année de doctorat à l'Université de Picardie Jules Verne d'Amiens. Mon projet de thèse est financé par le Conseil régional de Picardie et porte sur le syndrome de Williams, une affection génétique neuro-développementale et ses conséquences sur le langage, la reconnaissance des visages et la théorie de l'esprit.
Le financement est un élément essentiel pour avancer correctement dans mon travail de recherche. Je peux me consacrer entièrement à la thèse et gérer plus facilement les phases de stress, les dead-lines à respecter et les diverses taches à réaliser. Je suis très bien encadrée par mes co-directeurs de thèse et aussi bien entourée par mes collègues du laboratoire.

Je vais proposer à nouveau un témoignage à Notre Sclérose pour évoquer le changement de ville quand on a une SEP. J'agrémenterai mon récit de petites autres nouvelles.

À bientôt,

Claire.

04/07/2013 à 12:21 par Sébastien
Bonjour Claire,

Votre témoignage me touche, les autres témoignages aussi. Dans vos propos, il y a de l'émotion, de la volonté, de la détermination, c'est magnifique.Tous admirent cette détermination et je la partage sans mesure.

C'est tellement formidable de viser un tel objectif : une thèse ! Une thèse en dépit de la foutue maladie ! Votre premier témoignage, Claire, date de 2011, je ne le découvre qu’aujourd’hui, en 2013. Alors je suis curieux, pardon. Je ne peux cacher cette envie de savoir : où en êtes-vous de cette thèse que annonciez comme un projet imminent en 2011 ? Avez-vous bien avancé ? Je sais que ça demande un lourd investissement, une thèse. Chapeau pour un tel projet ! Chapeau pour tout le courage que réclame cet effort.

Est-ce que vous pourriez me donner quelques nouvelles aujourd'hui ?

Sébastien C
un autre malade, Sépien lui aussi…

20/03/2010 à 21:24 par Agnès
Quel beau témoignage et bravo pour ton recul sur la maladie malgré ton jeune age. Ton humour et ton autodérision m'ont beaucoup plu. Bizz

14/03/2010 à 03:56 par gacem
bonjour a tous !!!!!!!!!!!!mallades svp donner 1 pe 2 news bur cette malladie 2 !!!!!!!!!!

07/03/2010 à 19:27 par claire
Bonjour à tous,

Je vous remercie pour tous vos commentaires de soutien, d'encouragement et de félicitations. Cela me touche énormément.

Bisous à tous (et particulièrement à mon oncle et ma tante, André et Isabelle, et leur petite princesse Enora).

Bonne semaine.

Claire.

PS : Athos n'est pas mon chien, je l'ai rencontré en vacances, son maître était le propriétaire du gîte où nous logions, ses rendez-vous quotidiens pour jouer au lancer d'épi de maïs étaient de réelles parties de plaisir et de fous rires. Il passait ses journées à m'attendre pour que l'on joue ensemble, il m'accueillait par de joyeux aboiements et des remuages de queue frénétiques dès le petit-déj ou au retour de la plage : un vrai pot de colle !

05/03/2010 à 21:37 par André
Bravo Claire, tu apportes ici un témoignage émouvant qui nous fait mieux connaître ta maladie et surtout, le plus important, tu fais tout pour avoir une vie normale. Je sais que tu es une battante, continue ton combat contre la maladie. Biz
André

04/03/2010 à 17:49 par karine
bonjour , je me revois moi aussi à l'aube de mes 20 même combat, tu es pleine de courage , et ça c'est le début de tout !!,et ton toutou est adorable(entre parenthésel ol ), il est bien que tu sois entourée bon courage dans la suite de tout tes projets
biz

03/03/2010 à 23:40 par Florence
Bonjour Claire,
Je retiens de ton très beau témoignage la force extraordinaire qui est tapie en chacun de nous, que l'on déploit pour lutter, encore et toujours contre la SEP. Et celle, magnifique, que nous donne un entourage attentif et aimant, car c'est aussi pour eux que la vie continue du mieux possible.
Je te souhaite bonne route et conserve précieusement ton optimisme et tes rêves.
Florence

03/03/2010 à 14:14 par Isabelle
Ton témoignage est bouleversant Claire. Tu décris très bien ton combat contre la maladie, mais en même temps ton adaptation à la vie quotidienne en essayant malgré tout qu'elle reste la plus "normale" possible. Tu es pleine de vie , de ressources , de projets. Bon courage.

03/03/2010 à 10:19 par Adrienne/Handiady
Bravo Claire! Tu as dressé un portrait presque complet de notre ennemie! Pas évident d'être frappée si jeune, mais tu as un humour et une auto-dérision très sains qui t'aideront toujours! Réalise tes rêves, à ton rythme, mais ne lâche rien! Biz!

03/03/2010 à 07:56 par nicolen
tu as encore plein d'espoir et de projets et surtout ne les abandonne pas, c'est grace à eux que tu tiendras le coup, bien sur il y a des jours où tu vas en avoir assez de demander de l'aide pour les choses quotidiennes mais la vie est comme ça tu ne pourras pas la changer et garde ce moral qui te donnes l'envie de te battre .Courage
Nicole (non sep mais parent de sépien)

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