« Bonjour,
La date exacte ou plutôt le jour, je ne me souviens plus, ce que je peux vous dire c’est que c'était début novembre 1998.
Ce jour-là, comme les autres jours, je me lève et là, a ma plus grande stupéfaction, je voyais double : « diplopie » quoi ! mot que j’apprendrais plus tard… bien entendue. Les objets en double, les personnes, enfin vous imaginez l'horreur.
Je me suis dit c'est la fatigue ça va passer, malheureusement c'était de pire en pire.
Je me suis donc rendu chez mon ophtalmo qui a contrôlé mes yeux, et ceci pendant 15 jours. Je le voyais tous les 3 jours à sa demande et au bout de 2 semaines, il m'annonce : « Il faut voir un neurologue, je vous prends un rendez-vous ».
Dans ma tête je me disais : « Ça prend des proportions tout cela ».
Une semaine après j'avais le rendez-vous chez une neurologue. Je m’y suis rendu seule avec la peur au ventre. C'était une dame assez sympathique qui m'a fait de nombreux tests pour me dire à la fin : « Vous êtes jeunes ». C’est sur, j'avais 28 ans, c’était le bel âge non ! vous ne pensez pas ? L'âge où l'on a plein de projets de vie. Et elle me dit d’une voix calme : « Je souhaite que vous passiez une IRM ». Puis elle me pose comme question, avant ou après les fêtes de Noël ? Je ne sais pas ce qui c'est passé dans ma tête : à croire que l'on a un 2ème sens, ou la peur, alors j'ai dit : « Après les fêtes ».
Le 3 janvier 1999 rendez-vous pour l'IRM, je m'y rends avec mon cher et tendre époux. J'avais le nœud au ventre, je me sentais dans un autre monde, moi qui ne connaissais le milieu hospitalier que pour la naissance de mes deux fils : Julien né en 1993 et Alexandre né en 1997. Vous pouvez imaginer le stress qui monte et qui monte, jusqu'au moment où on vient vous appeler et là vous partez seule, enfin presque seule avec un aide-soignant vers un lieu inconnu. Nous rentrons dans un petit vestiaire où l'on vous dit d’enlever bijoux, ceinture...
J'obéis comme une enfant car à ce moment-là, j'étais vraiment une enfant seule. On m'installe et on me dit : « Si vous sentez le moindre problème vous sonnez ». Je me disais quels problèmes peut-il m'arriver ? J'avais plein de sentiments qui se bousculaient dans ma tête dans ce couloir que l'on appelle IRM, où il ne faut pas bouger.
Je termine l'examen sans problème et l'on me dit t'attendre dans le vestiaire et encore une fois, j'obéis comme une enfant.
Le radiologue rentre et me dit : « Comment allez-vous ? ».
Je lui réponds : « Mieux, beaucoup mieux, je ne vois double que quand je regarde par-dessus mon épaule donc vers l'arrière ».
Ces premiers mots raisonnent encore dans ma tête :
« Madame, je peux vous dire que vous n'avez pas de tumeur ». À ce moment-là je me suis tournée vers le mur et j'ai dit : « Je n'ai jamais pensé à cela ». Lui : « Mais vous avez quelque chose et l'on risque de se voir souvent ». J'essaye d’en savoir plus : « Je ne suis pas apte à vous le dire c'est à votre neurologue de vous en parler ». J'ai dit d'accord sans larmes, sans rien, j'étais vidée tout d'un coup.
Je rejoins mon mari en attendant le rapport, je lui dis : « J'ai quelque choses », mais quoi ?
On me remet le rapport, quelle erreur de leur part, il ne me connaissait pas, arrivée à la voiture j'ouvre l'enveloppe et avec mon mari on lit le compte rendu, mais bien sur on ne comprend rien. Mon mari me dit : « On rentre vite pour aller voir notre médecin traitant » car c'était un vendredi soir et je voyais ma neuro le lundi. Donc : passé un week-end à se poser des questions, pas bon ! Pas de chance, mon médecin était déjà parti alors, je me rends chez ma maman qui me gardait mais 2 petits garçons : un de 6 ans et l'autre de 1 an et demi.
Il se trouve que mon frère était là, lui sapeur-pompier de Paris. Je lui montre le rapport, il me dit : « J'appelle à Paris j'ai un pote radiologue, lui il va nous dire ». Je dis ok. En ce temps-là, ma mère avait un téléphone avec haut-parleur, mon frère lit le rapport en détail et son ami lui dit : « Si ta petite sœur est là je ne dis rien ». Tout à coup mon frère coupe le haut-parleur et dit à son pote : « Vas-y je t'écoute ,elle n'est pas là ». Et là j'ai vu et je revois le visage de mon frère se décomposer comme jamais je ne l'avais vu . Les sapeurs sont forts mais là, j'ai compris que c'était grave même très grave vu sa tête après avoir raccrocher. Là, je lui dit déconne pas dis moi je suis ta sœur s'il te plait je t'en supplie. Et c'est mon frère qui m'a dit : « Ça ressemble à une sclérose en plaques mais il faudra que tu passes d'autres examens ». J'ai avalé ma salive et j'ai dit : « Je vais me soigner ».
Ma mère s’est mise à crier : « Ne l'écoute pas ce n’est pas possible ! ».
Elle est partie téléphoner à ma grande sœur qui a voulu me parler, je ne me souviens plus de la conversation mais ce dont je me souviens c’est de la réaction de mon autre grand frère qui pendant environ 1 mois ne pouvait pas me parler car il ne faisait que pleurer. Je n'avais que son épouse au téléphone et elle me disait que c’est plus fort que lui, il pleure. Il trouvait injuste que sa petite sœur tombe malade. C’est drôle les différentes réactions. Avec mon mari on s’est regardé et on s’est dit « On va se battre contre cette maladie si injuste qui touche les jeunes ».
Le lundi arrive, j'étais très forte, au fond de moi devant la neurologue je lui ai dit de ne rien me cacher. Elle : « Je pense que c’est une maladie neurologique ». Elle me dit : « Vous pensez à quoi ? » Et moi, avec petit sourire, je lui répondre : « Une sclérose en plaques » et là elle me dit : « Oui mais il faut que l'on complète les examens avec une ponction lombaire ». Je suis restée une semaine. En ce temps-là pour avoir droit aux interférons, il fallait voir un professeur. Dans ma région, les délais d’attente étaient de 6 mois.
Mon frère, le sapeur : « Je vais appeler mon capitaine, il a des relations ». Au bout de 3 semaines, j'avais rendez-vous sur Paris à La Pitié Salpetrière avec super Professeur avec un petit nœud papillon mais vraiment d’une gentillesse comme jamais j’ai vu.
Il m'a remis l'ordonnance avec une cassette vidéo et je suis repartie vers mes Pyrénées-Atlantiques où je vis.
Je me faisais des injections tous les jours, au bout de trois mois, deuxième poussée, là, la jambe droite qui ne répondait plus , pendant 6 ans d'interférons Rebif ®22, puis Rebif®44, tous les trois mois une poussée, chez moi on disait que c'était cyclique. Donc cortisone (bolus) à chaque fois.
Puis on a essayer Mitoxantrone® (le produit bleu ma couleur préférée) mais ça non plus, pas de résultat. Donc le professeur a décidé de me mettre pendant 3 ans sous Endoxan® et là, récupération spectaculaire, j'ai tout récupéré je précise que j'ai été sur fauteuil… paraplégie des 2 jambes, paralysie de la vessie, et tant d'autres choses. Juste pour dire qu'il ne faut pas perdre espoir ! Et là, je marche très bien. Mon neurologue a décidé de laisser mon corps au repos car avec tous les produits que j'ai reçus, je mérite bien un peu de paix. J'ai toujours été positive.
Là, la maladie dort et j'espère qu'elle va dormir longtemps mais surtout, ne vous découragez surtout pas ! Je suis tellement triste de savoir qu'il y a en de plus en plus, il faut que l'on en parle. Moi, ma famille ne parle plus, elle me voit bien donc ils se disent : « elle va bien », mais moi je sais, comme vous, que j'ai une épée au-dessus de ma tête et quand elle tombera, elle fera mal, même très mal.
Je sais, j'ai été très longue, mais mon rêve serait d'écrire un livre pour donner des détails sur les amis… le pourquoi… car moi je pense savoir pourquoi la maladie s'est déclenchée.
Par Sabine, 38 ans, bientôt 10 ans de maladie.
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J’ai lu vos commentaires à tous qui sont terribles… J’aimerais savoir si Stéphanie tu es repartie vivre en Nouvelle Calédonie, car j’aimerais y vivre et je n’ai trouvé aucune info là-bas concernant la SEP…