« Bonjour à tous,
Depuis quelques mois, je lis les témoignages sur le site de l’Association Notre Sclérose et j’ai moi-même envie de partager mon histoire. Alors je saute le pas.
J’ai été diagnostiquée fin novembre 2021, quelques jours seulement après avoir fêté mes 23 ans. Tout allait bien pour moi. Nous allions emménager ensemble avec mon copain, je venais de prêter serment et de devenir avocate et je venais d’être embauchée dans un grand cabinet d’avocat.
Tout commence fin octobre. Je suis isolée car j’ai le Covid. Deux jours avant la fin de ma quarantaine, je pars me promener dans mon village pour m’aérer. Pendant ma promenade, je suis prise de douleurs assez inédites dans le pied. Je mets ceci sur le dos du Covid. Je me rends quand même le lendemain chez le médecin, qui me prescrit des vitamines. Rien d’anormal, j’aurais moi moi-même fait un lien avec le Covid.
Puis les jours passent, mais la douleur persiste et se répand à la jambe. Je me rends chez un autre généraliste 15 jours plus tard et encore une fois : c’est dû au Covid, il me prescrit encore des vitamines. Mon état se dégrade, je marche de plus en plus difficilement, je perds l’équilibre : je ne me reconnais plus. Avec des symptômes comme picotements, ruissèlement, chaleur, crampes, engourdissements, lourdeurs. Je suis persuadée que c’est dû au Covid et au vaccin, mais je ne trouve aucune piste sur internet.
Je commence à faire du télétravail, car impossible de me déplacer, et un mercredi, le jour de l’anniversaire de mon copain, je tombe 3 fois. Je m’écroule au sol, mes jambes lâchent.
Je décide de me rendre aux urgences près de chez moi, où on me fait un test Covid, des tests neurologiques pour les sensations et réflexes et un ECG. Comme j’ai eu le Covid trois semaines plus tôt, on met encore ça sur le compte du Covid long. Le neurologue me dit qu’il n’y a pas grand-chose à faire, qu’il faut être patiente, que des tests plus poussés comme un scanner ou une IRM ne montreront sûrement rien, mais surtout, il me conseille de prendre un « parapluie en guise de canne ». Je repars vacillante, avec toutes les difficultés du monde à marcher et triste d’avoir gâché la soirée d’anniversaire de mon copain, à perdre mon temps pour rien aux urgences.
J’ai la chance d’avoir un oncle médecin. Il me trouve des rendez-vous chez le radiologue et l’angiologue qui ne détectent rien.
À la maison, tout est compliqué. Je ne peux plus marcher et je reste toute la journée sur ma chaise, à travailler devant mon ordinateur. Mon pied droit ne bouge plus, que ce soit au niveau de la cheville ou des orteils, je ne peux plus rien bouger, comme si j’étais paralysée. Pour monter les escaliers, mon copain et mes parents doivent me tenir et me soulever, puis poser mon pied droit marche par marche. La nuit, je réveille mon copain pour aller aux toilettes et il doit m’aider à m’asseoir, je me douche assise. Les douleurs continuent dans toute ma jambe droite et la peau du côté droit du dos et du ventre devient hyper sensible.
Mon tonton arrive à me trouver un rendez-vous en urgence chez un neurologue. Je m’y rends en fauteuil roulant, prêté par ma voisine pharmacienne. Je suis choquée de me voir comme ça. Le neurologue fait un examen sérieux et approfondi, mais me dit que mon cas n’est pas assez urgent pour faire une IRM immédiatement, faute de personnel également. Encore une fois, rien n’est fait pour moi, alors qu’il n’est pas normal d’être en fauteuil à 23 ans, qu’on a aucun problème de santé et que tout va bien !
À ce moment-là, j’apprends le décès de ma grand-mère. Tout s’accumule.
J’appelle 5 ou 6 hôpitaux et cabinets de radiologie et j’explique ma situation. Personne n’a de place pour moi avant janvier pour une IRM (nous sommes fin novembre). Encore une fois, grâce à une cousine éloignée, je réussis enfin à avoir un créneau pour une IRM cérébrale et médullaire. Le neuroradiologue, adorable, remarque que c’est mon anniversaire le 25 novembre et me propose un rendez-vous le 26 à la place.
Le 26, je me rends donc à l’IRM, une première pour moi et en sortant c’est le coup de massue : hospitalisation immédiate. Je voyais bien à quel point ma situation était grave, je suis arrivée à l’hôpital en fauteuil, mais je ne m’attendais pas à cela. J’éclate en sanglots, car l’après-midi c’est l’enterrement de ma mamie et je ne peux pas louper ça. Je me rends donc à l’enterrement, en fauteuil, tout en sachant qu’après cela, j’entrerai à l’hôpital.
À l’enterrement, dans mon fauteuil, j’ai l’impression de « voler la vedette » à ma mamie, car les gens pleurent plus de me voir dans cet état que pour elle.
À 18 heures, j’arrive à l’hôpital. Ma famille part et j’ai un point au cœur de ne pas être avec eux et surtout avec ma mère après cette journée… J’enchaîne directement avec une ponction lombaire. Plutôt trois ponctions, en fait, car les deux premières ont échoué. Lors de la seconde, je n’ai jamais ressenti une telle douleur, une sensation de décharge du bas du dos aux orteils de ma jambe gauche, sept ou huit fois. Cette journée du 26 novembre 2021, je m’en souviendrai toute ma vie…
Le lendemain, je commence ma cure de cortisone pour cinq jours. Au bout de deux, je vois déjà une amélioration nette. J’arrive à sortir de mon lit et à me lever. Puis le lundi, après seulement trois jours d’hospitalisation, les neurologues me parlent de la sclérose en plaques, bien que les résultats de la ponction ne soient pas encore connus. Bizarrement, je ne suis même pas choquée : je prends cette annonce relativement bien. Je leur pose des questions, puis je me renseigne de mon côté sur la maladie. Je ne pleure pas. J’ai six ou sept prises de sang, pour faire tous les contrôles nécessaires. Mon état s’améliore à une vitesse fulgurante. En à peine 5 jours, je remarche (pas impeccablement bien sûr), je vais aux toilettes et me douche seule, je retrouve mon autonomie tout en faisant des séances de kiné 2 fois par jour. Le diagnostic de la sclérose se confirme, car mon IRM a démontré de nombreuses lésions actuelles mais aussi des anciennes.
Je ne garde pas du tout un mauvais souvenir de mon séjour à l’hôpital. J’ai dû pleurer deux fois, plus pour la perte de ma mamie que pour mon état de santé et ma maladie. Je pense que j’étais, en fait, soulagée d’être enfin prise en charge. Après un mois à voir mon état se dégrader et être complètement abandonnée et pas prise au sérieux, enfin on me prenait en charge et j’allais mieux. Je souffrais moins. J’ai eu beaucoup de visites à l’hôpital et beaucoup de messages et d’appels de mes proches et de ma famille ce qui a amélioré mon séjour.
Je sors finalement de l’hôpital début décembre et reprends ma vie. Je refais une IRM fin décembre. À ce moment-là, j’ai de nouveaux des symptômes dans la jambe et un voile au niveau de l’œil droit. L’IRM montre de nouvelles lésions qui sont apparues en un mois. Je n’ai plus de doutes sur ma sclérose en plaques et le neuroradiologue me le fait aussi comprendre.
Le 5 janvier 2022, le neurologue m’annonce officiellement ma sclérose en plaques. Je m’y attendais, mais il me dit que ma sclérose est « sévère et d’évolution rapide ». Ce sont surtout ces mots qui me font craquer et me font peur.
Il me présente les différents traitements adaptés à mon type de sclérose en plaques et l’après-midi même je commence le Tysabri® en sous-cutané. En parallèle, je refais des bolus de cortisone, afin de soulager ma gêne à l’œil et ma jambe, signes d’une nouvelle poussée.
Fin janvier, nouveau retour de symptômes. Toujours du côté droit et cette fois-ci, cela touche aussi le bras et la main. Je refais de la cortisone pendant 5 jours.
Cela fait maintenant 5 mois que je suis sous Tysabri®. Même si, de façon globale, je vis très bien et que ma maladie ne me prive pas de faire ce que je veux au quotidien, les retours de douleurs ponctuels au niveau de mon côté droit ou la fatigue que je peux ressentir me rappellent que je suis malade. Idem pour le fait d’aller chaque mois en hôpital de jour pour prendre mon traitement, qui me rappelle la maladie. Je ne me pose pas trop de questions sur l’avenir, sur comment ma maladie ça évoluer ou comment je vais « finir ».
Le 2 mai 2022, j’ai passé une IRM de contrôle et tout était parfait, pas de nouvelles lésions. S’en est suivi un rendez-vous avec mon neurologue qui m’a indiqué que ma sclérose en plaques se stabilisait et que je n’aurais probablement plus beaucoup de poussée avec le Tysabri®. J’avais l’impression qu’on m’annonçait que j’étais guérie…
Désormais, j’aborde la maladie sereinement et j’arrive à en parler sans tabou même si mes proches restent encore marqués de m’avoir vue ainsi. Mon copain a énormément fait pour moi pendant la manifestation de la maladie en novembre dernier en m’aidant tant sur le plan moral que physique, en me portant et me soutenant littéralement. Il m’épaule énormément au quotidien quand j’ai des douleurs qui apparaissent ou que j’ai des baisses de moral. Il est très présent pour moi et d’un grand soutien et je l’en remercie. Je sais que pour les proches ce n’est pas non plus facile à vivre et qu’ils essaient de rester forts pour nous et de ne rien laisser paraître de leurs inquiétudes.
Je vous remercie pour avoir lu mon très long témoignage. J’avais besoin d’écrire tout ce que j’ai vécu et de partager ce long parcours du combattant avant d’être enfin prise en charge.
J’aimerais aussi échanger avec des personnes dans une situation similaire à la mienne, que ce soit pour ce qui est de l’apparition de la maladie que pour le quotidien avec le Tysabri®.
Merci à tous et prenez soin de vous. »
Par Manon.
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