Vous savez ? Le fauteuil a un nom… il s'appelle Chantal !
« Bonjour,
Quelques années auparavant, j'avais osé partir en Afrique et j'avais témoigné que c'était encore possible… même avec un fauteuil, de partir à 10 000 km de la France et d'apprécier comme une touriste lambda, les beaux paysages, les gens attachants…
Oui et puis depuis ? Les tour-operators, sont frileux, ils évoquent la sécurité ou bien le confort des autres clients, pour ne pas vous accepter si vous voyagez non accompagnée… comme une enfant… à bientôt 50 ans… ça passe mal. Mais bon, je suis allée à Londres une journée lundi dernier, quelques jours après le jubilé de la Reine Elisabeth II. Je déteste la cohue, depuis que je circule en fauteuil roulant. J'ai l'impression que je suis invisible à cause de quelques centimètres en moins peut-être ?
J'ai pris pour la première fois de ma vie l'Eurostar. Je n’étais pas très fan de passer sous la Manche… mon côté un peu claustro… En fait c'est comme le métro parisien sans le bruit ! A part ça, j'ai mis un peu le holà sur les voyages à l’étranger, car j'ai préféré me rapprocher de ma famille, nous réunir sur une courte période (nous vivons tous à 850 km environ les uns des autres), et parce que je veux profiter du temps qui passe, et de mes proches ! On ne sait pas de quoi demain sera fait, je profite du moment présent. Rien n'est acquis, il faut manger la vie !
Justement ce billet, concerne l'âge et la sclérose en plaques. La veille de la journée mondiale de la sclérose en plaques, j'ai eu l'occasion d'aller voir la pièce de théâtre « SEP en scène » à laquelle de nombreux malades avaient participé lors d'entretiens enregistrés au siège de la LFSEP à Paris.
Nous avions tous des histoires différentes, des caractères parfois très opposés… Je me demandais bien qu'est-ce que tout cela allait donner ?
Au final, c'était surprenant d'entendre ses propos sur une scène, dits par des comédiens devant un auditoire important. J'ai eu l'impression que nos paroles comptaient.
Justement la salle des Salons Hoche, non loin de l'Arc de Triomphe, était pleine à craquer... Beaucoup de malades de tous âges, peu de personnes en fauteuil, surtout avec des cannes, ou sans rien du tout. J'ai revu des personnes croisées lors d'autres manifestations. Dans la foule, j'ai été surprise de voir d'honorables dames aux cheveux blancs, comme ma maman. Minces et délicates, à l'allure ralentie, aux gestes comptés, aux pieds un peu hésitants, rejoindre la prestigieuse avenue à la fin de la manifestation.
Et soudain, je me suis fait cette réflexion : « Un jour je serais comme elles ! ». Oui, on vit longtemps, même avec une sclérose en plaques.
J'imaginais que ces charmantes dames aperçues, l'une soutenant l'autre, avaient du vivre à l'époque où leur maladie s'était déclarée, le parcours souvent entendu : « Tout ça c'est dans votre tête, allez voir un psy ! Elle est toujours fatiguée celle-là, quelle feignante ! Mais elle boit, regarde elle titube…» Dorénavant, les diagnostics ne prennent pas 10 ans à être posés, on a l'IRM, la ponction lombaire. Dorénavant, les traitements de fond se multiplient, les prises en charge associées, permettent une espérance de vie, et un confort de vie bien meilleur qu'il y a 20-30 ans.
J'ai fait un bilan de ces années, de mon ressenti en tentant de vivre ma vie avec mes envies, en utilisant un fauteuil roulant depuis déjà quelques années. Le choc un peu rude, et les attitudes parfois maladroites, parfois complètement nulles. Cela fait bientôt une décennie avec la sclérose en plaques, et certains aléas qui auraient pu également survenir sans la maladie : éloignement, ou perte d'amitiés (étaient-ce réellement des amis ?), dureté de certaines confrontations dans la rue avec des inconnus, qui ne savent pas ou ne veulent pas nous considérer comme des personnes à part entière… En fait, ces gens là, je m'en fous, je suis détachée de ça, mais implacables, pour préférer aller dans des lieux accueillants, avec des personnes simples et sincères.
Quelque soit ce que me réserve cette maladie, je sais mieux ce que je veux faire de ma vie, ce que je ne veux plus, et ce qui m'importe vraiment. Alors vogue le navire, et je n'hésite pas à reprendre les gens qui nous jugent mal, ou nous réduisent à un objet, et oui… le fauteuil a un nom il s'appelle… Chantal. »
Par Chantal.
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