« Bonjour,
1er janvier 2005. Il y a des dates qui restent dans la vie. À peine réveillée ce matin-là, j'ai la jambe engourdie. Bizarre. Peut-être pas bien réveillée, un peu claquée.
Les minutes passent, toujours l'impression d'avoir le pied et le mollet anesthésiés. Une fois debout, pareil. Merde, qu'est-ce que c'est que ce truc !
J'y fais moyennement gaffe dans la journée. Peut-être une courbature ou autre. Mais ça reste dans un coin de ma tête…
Les jours passent le problème persiste. Et puis, une ombre plane au dessus de ma tête. Un de mes ascendants a une sclérose en plaques. Je refuse de croire que ça puisse être ça.
Je consulte mon médecin de famille, lui parle du problème, il me sent très inquiète et me dit qu'il sait ce que je crains. Mais, j'ai à peine 20 ans, et puis deux cas dans la même famille, ce ne serait vraiment pas de bol que tu déclares ça si jeune.
Je m'auto diagnostique via les moteurs de recherche, deux possibilités, sclérose en plaques ou tumeur au cerveau, recherche à la con, en pleine nuit, vu que je dors mal. Mon généraliste m'a pris rendez-vous chez une neuro, test électrique sur un nerf de la jambe, origine système nerveux central. J'évoque mes antécédents familiaux en priant pour qu'elle me traite de parano : "Non, c'est une possibilité", dit-elle.
Je prends le métro en rentrant, je devais être sous le choc, parce qu'à peine entrée dans la rame, quatre personnes me cèdent leurs places assises.
Mes partiels approchent. Grande période de stress. Je consulte un ostéopathe, vu que j'avais passé le bac avec un torticolis… Le problème ne vient pas de là. Je passe les partiels la tête ailleurs.
IRM dans un centre de cancérologie, rendez-vous plus rapidement obtenu là-bas. Selon le radiologue : "Vu vos antécédents familiaux, vous avez une sclérose en plaques". Je sors du bâtiment hagarde et je vomie.
Quelques heures plus tard, j'ai rendez-vous avec un nouveau neuro. Je passe la consultation, comme un zombi, je fixe le cactus à côté de moi. J'écoute distraitement quand il me dit : - vous avez une sclérose en plaques (…), ne vous inquiétez pas, ça ne vous empêchera pas d'avoir des enfants… Qu'est-ce que j'en ai à foutre, ma vie vient de se briser. Et puis quoi des enfants qui risquent comme moi d'en prendre pour perpét’ à 20 ans.
Le temps passe, je refuse d'y croire, je ne suis pas de taille, un seul épisode ce n’est pas déterminant. Je refuse la ponction lombaire, je peux vivre avec le doute.
Fin novembre suivant, vue floue. Je refuse que ce soit ça, rendez-vous chez l'ophtalmo, qui évoque une piste neuro. Deuxième poussée, je suis ko. Je passe 48 heures à pleurer, je me réveille en pleurant, m'endors en pleurs.
Les années passent, et je découvre une ou plusieurs fois par an, les différentes palettes de la sclérose en plaques.
2008-2009, Imurel® et accalmie relative. Des séquelles ça et là mais ça a l'air de se tasser.
Je commence à passer de la survie dans laquelle je m'étais enfermée à ma vie, dans laquelle je me remets à investir.
Début 2010, la bérézina. Période difficile sur le plan pro. « Burn out ». Arrêt de travail de plusieurs mois. Je repleure enfin, après 5 ans de larmes taries, émotionnellement, je me déparalyse.
2011, 14 juillet, un sens de l'équilibre vacillant. L'IRM confirme la source du problème. Et puis c'est l'escalade. Avonex®. Novembre, nouvel épisode, avril bis repetita. Arrêt d'Avonex®. Début de Gilenya®.
Ma vie est en vrac, la journée mondiale de la sclérose en plaques est passée assez inaperçue, je trouve.
Une impression que tout le monde s'en fout, alors je témoigne, un cri dans le désert. »
Par Lisa.
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