« Bonjour tout le monde,
C’est la première fois aujourd’hui que je me pose et que je vais réellement penser à ce qui s’est passé ces derniers mois. J’ai fait face à une grosse annonce et je pense que c'est la plus grosse annonce de ma vie pour le moment.
Du haut de mes 18 ans, j’étais à la fin de ma première année à l’université. Une année assez particulière étant donné l’actualité au niveau sanitaire, mais j’arrivais à m’en sortir et à rester optimiste en me disant que cette période de stress, de tourmente et d’épreuve allait bientôt prendre fin. Car oui, pour les étudiants, dont moi, c’était assez compliqué !
Vient alors ma semaine de partiels, celle tant redoutée par l’ensemble des étudiants que je connais. Le 17 mai, je m’apprête à commencer mon premier partiel et soudainement, je sens des fourmis envahir mes mains pendant quelques minutes, rien d’alarmant. Puis, au fil de la journée, ces moments de fourmillements reviennent quand je tiens mon téléphone, quand j’écris, quand je ne fais rien de spécial au final… Cela ne me gêne pas plus que ça : pour moi, ce sont des fourmis car « Je suis restée trop longtemps dans cette position », vous voyez de quoi je parle. Cela ne dure pas, et disparaît. Cependant, c’est allé crescendo. Le lendemain, des fourmis atteignent mon ventre et l’avant de mes cuisses. Lorsque je touchais ces parties de mon corps, on aurait dit qu’elles étaient mortes, je ne sentais plus rien. Cela m’amusait, je me disais que mon corps n’en faisait qu’à sa tête et que ça allait passer. Par précaution, avec ma maman, nous sommes allées voir mon médecin traitant.
Celui-ci a supposé que cela pouvait être dû au stress des partiels, peut-être une crise de tétanie. Enfin bref, il n’a pas été pas plus alarmé que cela.
Puis, arrivée au dernier jour de mes partiels, le vendredi, les fourmis avaient pris possession de tout mon corps, du petit orteil jusqu’au bout de mes doigts. Seule ma tête était épargnée. Imaginez, être prisonnière de cette sensation désagréable, qui vous laisse l’impression que votre corps ne ressent plus rien, ne saisit plus rien, c’est plus que déroutant. Mais n’étant pas handicapée par cela, je suis tout de même partie rejoindre mes amis le soir même, pour fêter la fin de notre année. Auparavant, je suis sortie manger avec une amie : je lui ai expliqué mon cas et elle m’a donné son avis, en réfléchissant aux différentes causes. Elle évoque alors la sclérose en plaques. Je ne fais pas attention, on continue de parler tranquillement. Sincèrement, je ne me suis jamais autant amusée que ce soir-là. Mon corps n’était plus là, mais je me sentais plus vivante que jamais.
Le lendemain, je devais me rendre à une journée « désintégration » du programme de la réussite de ma résidence. Mais c’était plus grave, les fourmis « me bloquaient ». Je ne sais pas comment l’expliquer, mais j’étais comme un robot qui était coincé et ne pouvait faire que des mouvements saccadés, peu contrôlés.
J’en fais alors part à des amis qui me disent d’aller aux urgences. Aussitôt dit, aussitôt fait, j’appelle ma maman pour qu’elle m’y emmène. Je suis allée à un premier hôpital mais il faut savoir que c’est l’endroit que j’aime le moins au monde. Je crois que cela me fait un peu peur. J’ai passé des heures dans cet hôpital, mais peu de tests médicaux me sont faits. Je vois quand même une psychiatre qui me dit que c’est sûrement dû au stress, qu’il faut que j’apprenne à le gérer. Soit, si les médecins disent cela, je ne peux qu’approuver. De plus, je suis de nature très stressée, à faire des crises d’angoisses la nuit, à n’en plus dormir… cela va de soi.
Mais le lendemain, malheur ! Je n’arrive presque plus à marcher. Mon corps tient debout, mais mes jambes sont «rouillées ». J’ai peur, je ne sais pas quoi faire, ni comment expliquer ce que je ressens à l’intérieur de moi… Mes parents ne comprennent pas. La journée passe sans aucune amélioration. Je n’arrive plus à ouvrir une bouteille d’eau, à m’habiller, à me doucher… Mon corps ne ressent plus rien, je ne ressens plus mon corps. Puis, vient la goutte d’eau qui fait déborder le vase, je n’arrive plus à écrire mon prénom. Ça paraît bête, mais je n’arrive plus à écrire, je ne guide plus mes mains, elles n’arrivent plus à retranscrire mes pensées. J’éclate en sanglots et ma maman m’emmène à l’hôpital (différent du premier).
Nous attendons aux urgences, les infirmières me mettent un cathéter que je supporte mal et je m’évanouis. Oui, j’en ai conclu que l’hôpital me faisait très peur, car normalement je ne suis pas aussi douillette que ça.
Puis on m’amène dans une chambre où j’attends de longues heures, mais mon cas est davantage pris au sérieux. Un médecin vient me voir et me fait des tests lambdas… N’étant pas sûr du diagnostic, il me demande de rester la nuit afin d’approfondir les tests dans la semaine. Je reste dormir à l’hôpital et je cogite toute la nuit. Qu’est-ce que cela peut bien être ? J’imagine le pire. Je tente de faire des recherches sur internet via les commandes vocales de mon téléphone car je ne peux pas utiliser mes mains… Et je vois des choses horribles.
Le lendemain, je passe une IRM de la moelle épinière. Les résultats tombent, mais les médecins n’étant pas certains de ce qu’ils obtiennent, me demandent d’effectuer une ponction lombaire puis, une IRM cérébrale… Face à ces demandes, je garde espoir. Je me dis que les médecins n’ont pas l’air tellement pessimistes, que cela est juste « pour être sûrs ». Pendant toute cette épreuve, mes parents et mes sœurs me soutiennent, mais honnêtement, je me sens seule et incomprise.
Quelques jours plus tard, le résultat tombe. J’ai une sclérose en plaques.
Je ne réagis pas, qu’est-ce qu’une sclérose en plaques ?
Les médecins me disent que ma vie va changer, que je vais avoir un traitement, que je vais ressentir différents symptômes éphémères : grosses fatigues, troubles de la vision, de la mémoire, de la concentration, problèmes physiques… Ils me disent que j’ai peut-être cette maladie depuis plus longtemps, mais que je viens tout juste de me la faire diagnostiquer, suite à ma poussée - mot que j’ai appris depuis.
Tout est plus clair dans ma tête. Cela fait deux ans que je me sens moins en forme, moins bien physiquement, que mon corps m’envoie des alertes par-ci, par-là… Mais jamais je n’aurais cru que la sclérose en plaques aurait pu être la cause de tous ces petits problèmes.
Par la suite, on m’injecte des corticoïdes par bolus sur trois jours et les deux autres jours suivants, je prends 10 comprimés de Médrol® par jour - ce qui n’est pas très appétissant, honnêtement. Je reste une semaine et quelques jours de plus à l’hôpital, où je fais de la kiné, puis on me transfère dans un Centre de rééducation pour quelques mois où je ferai de l’ergothérapie, de la kiné, de l’APA (Activité Physique Adaptée) et où je verrais une neuropsychologue.
Les paresthésies (fourmis) commencent à disparaître, mes sensations reviennent, j’arrive à remarcher normalement, à redevenir autonome, et je ne remercierai jamais assez les professionnels pour le travail effectué.
À l’heure actuelle, je n’ai pas refait de poussée depuis mai dernier. Je prends mon traitement comme mon neurologue me l’a prescrit. Il y a des jours avec et des jours sans. Parfois mon corps et mon mental ne suivent pas, et alors ? Je les écoute et je prends du temps pour moi. Et la sclérose en plaques ne m’a pas handicapée, au contraire. Elle me pousse au-delà de mes limites. Après cet épisode de ma vie, j’ai eu mes partiels, j’ai eu mon permis et j’écris actuellement de Suède où je passe une année Erasmus. Tout est possible ! Cependant, en réalité, c’était tellement étrange… Ma vie a basculé du jour au lendemain. J’ai eu peur pendant très longtemps, allais-je finir en fauteuil roulant ? Allais-je perdre la vue ? Allais-je avoir une vie différente ? Comment allait-on me comprendre moi, porteuse de cette maladie dite « invisible » ?
Ayant passé une partie de mon été en centre (je ne passais pas mes meilleures vacances), cela m’a permis de réfléchir sur moi-même. Tant de fois je me suis prise la tête sur des petits problèmes, des choses sans réelles importances, insignifiantes, futiles. Je vivais pour les autres, en essayant d’être la version de moi-même qu’ils souhaitaient, pour ma famille, mes amies, mes camarades, mes études…
Mais au final, je me suis rendu compte que la vie ne tenait qu’à un fil et que du jour au lendemain, tout peut changer en un claquement de doigts, en un fourmillement.
À présent, je vis pour moi, pour mon bien-être, pour qui je souhaite être réellement. Peu importe ce que l’on dit de moi ou ce que l’on pense de moi. Oui, ça n’est pas facile tous les jours, je remets plusieurs fois en question ce mode de vie. Mais non, il faut apprendre à se dire que la vie est belle. D’ailleurs, je remercie une dame, devenue une « copine de SEP », qui m’a épaulée lorsque j’étais au plus bas. Aussi, je remercie tous les jours le bon Dieu de m’aider dans cette épreuve. La sclérose en plaques est moins une épreuve qu'une collègue au quotidien, je vis avec elle et elle est en moi.
Je n’ai jamais autant compris à quel point la vie est extraordinaire et j’ai tellement de chance d’être encore là pour témoigner de mon histoire, sensibiliser et dire que oui, on peut vivre malgré la maladie.
Peut-être que celle-ci évoluera, peut-être pas et bien je fais comme elle, je vis au jour le jour, et advienne que pourra…
Mon corps et moi, nous sommes prêts pour cela. »
Par Nayss.
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Utilise un tapi de marche en plus du vélo, oui avec le sport nous somme tous gagnant, ce que me conseil le professeur Pelletier, après je prend la cure de Yysabri, toujours un plus pour vivre super bien