Mon ouragan :
« Bonjour,
Aujourd’hui, j’ai 33 ans. Les premiers symptômes de ce que j’appelle mon ouragan remontent 18 mois en arrière : mai 2009, 10 jours de fourmillements dans une jambe, puis plus rien pendant 1 mois ; je suis en train de partir pour vivre quelques temps outre atlantique avec mon conjoint et ma fille de 2 ans et n’y prête pas vraiment attention, pas le temps… ; puis retour fulgurant des symptômes 1 mois plus tard alors que nous commençons à nous installer en Colombie Britannique (ouest canadien) : en 3 jours, je boite fortement, et tout va très vite : le généraliste évoque tout de suite une possible sclérose en plaques, scanner, quelques jours d’attente avant l’IRM mais j’arrive plus tôt que prévu aux urgences : dysurie (impossibilité de vider ma vessie), transfert en neurologie, IRM le lendemain, assez catastrophique (au début, ils évoquent une possible tumeur à la colonne), mais l’IRM du cerveau fait pencher pour une sclérose…
Entre temps, je suis devenue complètement paralysée des membres inférieurs. Mais la cortisone administrée fonctionne à merveille et je récupère quelques centimètres de mobilité chaque jour.
Après la ponction lombaire, le diagnostic se confirme en quelques jours, même s’il n’est jamais définitif…
Tous les jours mes proches suivent par téléphone, depuis les 4 coins du monde, mes petits progrès. Le haut de mon corps fonctionne bien et j’apprends vite à faire mes transferts pour sortir me balader dans les couloirs puis dehors… Au bout de 15 jours d’hospitalisation en neuro, j’obtiens une place dans un service de rééducation plus proche de ma petite famille (les distances sont grandes au Canada). Je commence à être verticalisée, on m’apprend à m’auto-sonder (ma dysurie durera 2 mois). Il me faudra 2 mois et demi pour remarcher sans aide, et j’ai récupéré une grande partie de mes capacités.
Cette maladie vient chambouler notre projet vie. On aurait dit un ras de marrée. Elle remet en cause notre projet d’immigration au Canada, longuement muri depuis 3 ans… (j’ai été hospitalisée alors que nous venions d’arriver depuis moins de 2 mois) ; Le pire moment dirait mon conjoint, le meilleur à mon avis car nous étions prêts à faire face à l’inconnu… et ce fut le cas ! On fait alors le choix de rentrer en France après un mois d’hospitalisation au Canada. J’aurai pourtant été aussi bien soignée là-bas qu’ici, mais les incertitudes face à l’avenir et l’éloignement d’avec la famille ont eu gain de cause.
L’assurance de ma carte bleue m’organise un rapatriement avec infirmier dès que nous avons trouvé un hôpital pour me réceptionner. Je passerai encore 6 semaines en rééducation, pour en ressortir sur mes 2 jambes ! Restent les fourmillements et insensibilités partielles qui ne me quittent jamais, des sensations de raideurs dans les jambes, des brulures passagères et imprévisibles et des problèmes fluctuant au gré des poussées : problèmes d’équilibre, de sensibilité, sphincters insensibles et capricieux,… moral lui aussi fluctuant…
Depuis, la maladie ne me (nous) laisse vraiment pas tranquille. Je fais en moyenne une nouvelle poussée tous les 2 mois, avec à chaque fois, un petit retour en arrière, de plus grandes difficultés pour marcher, et une longue récupération incomplète.
Côté traitement, c’est encore en test… Après 159 piqures de Copaxone®, je suis maintenant sous Tysabri® depuis 5 mois. Pour l’instant, je n’ai ressenti ni d’effets positifs, ni d’effets secondaires avec ces traitements… mais mon IRM semble s’en sentir amélioré depuis peu.
Par contre, je commence à redouter les bolus de corticoïdes qui, s’ils ne me faisaient pas grand-chose au début côté effets secondaires, me mettent maintenant à plat avec un moral à zéro.
Mes plus grandes difficultés ? Communiquer avec mon entourage parce que cette maladie est souvent incompréhensible et n’améliore pas mon caractère ; accepter d’être dépendante (je ne conduis plus, je me fatigue vite en position debout) ; affronter la connerie humaine par exemple dans les files de supermarché… ; manquer de réseau social car je ne travaille plus pour l’instant et que nous avons emménagé dans une nouvelle région, devoir me battre pour circuler dans une ville mal adaptée…
Mais la vie n’est pas triste tous les jours, avec une petite fille de 3 ans. Parfois je m’épuise, mais c’est souvent beaucoup de bonheur ! Elle est fan du « monsieur qui lance sa canne » et chante « Ma sclérose » ! Heureusement qu’elle est là ! Et j’ai la chance d’être aussi bien entourée par la famille, les amis même éloignés qui font le maximum à leur niveau…
Les projets ? Faire l’acquisition d’un fauteuil électrique pour pouvoir me déplacer davantage et sans trop me fatiguer, parce que ce n’est pas quand ma fille aura 15 ans que j’irai au parc avec elle ; Rechercher du boulot dès que la maladie se met en sommeil quelques mois ; Refaire des projets de grands voyages…
Courage à tous, avec nos sclérose en plaques si atypiques les unes que les autres !
Ce n’est pas drôle tous les jours, mais elles ne nous auront pas ! »
Par Marie.
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