Ma vie avec cette colocataire forcée.
« Bonjour,
Aujourd’hui, je souhaite partager une partie de mon histoire avec vous et qui sait, peut-être, qu’elle pourra aider et soutenir d’autres personnes…
J’ai une sclérose en plaques depuis maintenant 12 ans. Lorsque que ma colocataire sonne à la porte de ma vie, elle n’est pas attendue, pas souhaitée, et elle fait même peur. Plusieurs mois avant l’annonce du diagnostic, elle se manifeste par des paralysies faciales, des aphasies et ma vue qui baisse d’un coup (je fais une névrite optique à l’œil gauche) mais je ne m’alarme pas plus que cela : étant myope, je pensais qu’il était temps de changer mes lunettes. Mais ces symptômes persistant, je vais consulter mon médecin généraliste puis mon ophtalmologue. Mon médecin, après la description de ces épisodes, m’a orienté vers un confrère à l’hôpital, un neurologue, afin de passer des examens supplémentaires car il avait des doutes sur mes troubles. L’ophtalmologue, ne constatant rien de particulier, me prescrit de nouvelles lunettes. Il pense à une baisse de l’acuité visuelle liée à ma myopie. Je vais passer une IRM cérébrale et une ponction lombaire qui poseront le diagnostic. Le 1er mai 2008, le neurologue m’annonce que j’ai une sclérose en plaques. J’ai 20 ans et cette annonce a eu l’effet d’un tsunami dans ma vie.
Je n’ai alors aucun traitement et le neurologue m’explique ce que ces trois mots « sclérose en plaques » signifient. J’entre dans ce que l’on appelle les phases d’appropriation de la maladie, qui m’est inconnue. Tout d’abord, je suis sous le choc par le diagnostic, par les conséquences que l’on me présente, par cette maladie que je vais avoir à vie. Puis, j’ai consciemment et inconsciemment évité d’y penser, minimisant des symptômes qui, pour moi, n’en étaient pas, comme une intense fatigue que je mettais sur le compte ma première expérience professionnelle de l’époque.
Arrive l’inquiétude, qui se transforme peu à peu en peur lorsque surviennent deux névrites optiques en moins d’un an, plus intenses et durables. En moins de deux ans, j’avais déjà eu quatre poussées inflammatoires, qui correspondent à l’apparition d’une nouvelle lésion, voire à l’aggravation d’une lésion déjà présente qui entraîne des symptômes ressentis. Les répercussions sur le plan psychologique ont été particulièrement difficiles. Je commençais à perdre confiance en moi. Je me suis repliée sur moi-même et j’ai dû arrêter, pendant quelque temps, mes études. Mes symptômes m’handicapant, j’avais peur de moi-même et je suis entrée dans une phase dépressive.
Malgré le soutien indéfectible de ma famille et d’ ami(e)s, j’ai mis du temps à me relever. J’ai eu un premier traitement pour enrayer les symptômes, mais celui-ci m’épuisait littéralement et j’ai de nouveau fait une poussée inflammatoire : cette fois, c’était un trouble de la marche. C’est en essayant un autre traitement que les choses ont commencé à s’améliorer, du moins pour un certain temps. Après quatre ans et demi de vie avec la sclérose en plaques, j’arrivais mieux à reconnaitre les douleurs et j’acceptais de vivre au mieux avec ces différents symptômes. Je reprenais avec passion mes études et le dessin.
Mais en 2014, je m’effondre en tentant de me lever de mon lit. Ma jambe gauche ne me portait plus et je ne ressentais plus de force à mon bras droit. Péniblement, je me suis relevée et suis restée assise un moment sur mon lit. Depuis le diagnostic, six ans plus tôt, j’avais pensé à l’éventualité d’une paralysie ; il s’agissait pour moi d’une parésie, une paralysie intense des membres inférieurs qui allait s’estomper quelques mois plus tard, mais qui a eu un impact émotionnel et physique considérable jusqu’à aujourd’hui où je garde un certain déséquilibre lorsque je marche. Je me suis préparée au pire avec cette poussée inflammatoire. J’ai fait plusieurs séjours à l’hôpital entre changement de traitement, perfusions de cortisone et j’ai dû apprendre à attendre, oui à attendre de voir des effets positifs. Il aura fallu plus de six mois avant que je puisse de nouveau marcher avec moins de difficulté. Cela a été la poussée la plus douloureuse. On se met alors à penser au pire, ne plus pouvoir marcher, ou marcher péniblement, ou avec une canne. J’imagine que, comme d’autres personnes dans ces moments-là, on n’est pas gagné par des pensées positives. Pas vrai ?
La perspective de ne plus travailler m’a longtemps habitée, moi qui travaille dans un domaine où je suis souvent debout, toujours à courir à gauche à droite, accompagnant des enfants dans leur développement, et aujourd’hui des familles.
De cette épreuve, j’ai appris la patience et j’ai repensé mon quotidien. J’ai appris à prendre le temps, à me poser quand je suis épuisée. J’ai aussi la chance d’avoir une équipe professionnelle bienveillante qui m’accompagne depuis des années. Ma colocataire forcée n’a pas le choix, je ne lui en laisse plus, elle doit faire face à mes moteurs qui guident ma vie : le féminisme, l’humour et la créativité. Autant dire qu’en retrouvant des éclaircies sur mon chemin, elle ne fait pas trop le poids !
En 12 ans de vie commune avec cette sclérose en plaques, j’ai fait 8 poussées inflammatoires, variées et d’intensité différentes. Mais encore aujourd’hui, j’ai également ces symptômes invisibles, ceux qui surviennent même si la maladie est stable, sans poussée, sans progression, avec ou sans handicap permanent et qui contribuent parfois à l’incompréhension de l’entourage. Cette fatigue qui ne se voit pas toujours, les troubles de la sensibilité, l’anxiété, les troubles urinaires… Combien de fois ai-je entendu : « T’as pas l’air malade ». Oui, quand les signes de maladie ne se voient pas chez les autres, vous n’êtes pas malade, une représentation qui reste encore présente.
Alors oui, vivre avec une sclérose en plaques c’est rencontrer de nombreux orages, dont on ne voit pas de suite d’éclaircies, mais vivre avec la sclérose en plaques c’est aussi penser que nous pouvons retrouver nos potentialités, à notre rythme. Nous sommes nombreuses et nombreux à avoir été éprouvés par cette maladie, mais je veux croire que nous pouvons trouver des moyens afin de vivre au mieux avec notre sclérose en plaques.
C’est pourquoi j’adopte la citation de Sénèque qui disait : « La vie, ce n’est pas attendre que l’orage passe, c’est apprendre à danser sous la pluie ». C’est, à mes yeux, le résumé de ma vie avec une sclérose en plaques.
Je nous souhaite plein d’ondes positives. »
Par Laura.
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Il est vrai que pour ma part, elle me laisse un peu tranquille du moment que je ne vais pas trop loin de la maison avec la fatigue même pour aller chercher du pain ou au kiné et même à l' orthophoniste avec un VSL.
Du moment que ma SEP Primaire Progressive traité avec du RITUXIMAB depuis 2019 est stabilisée depuis 2021 avec les IRMs de contrôle mais avec une marche difficile avec une canne TRIPOD sur de petites distances